JACK WHITE, QUI VIENT DE TUER SES WHITE STRIPES, FAIT REVIVRE WANDA JACKSON. LA REINE DU ROCKABILLY PÈTE LE FEU.

Dieu de l’électricité, dernier guitar hero, Jack White est aussi quelque part devenu le cerbère du rock. Après avoir enregistré Loretta Lynn, le leader des défunts White Stripes, de Dead Weather puis aussi des Raconteurs, offre une deuxième jeunesse à Wanda Jackson, pionnière du rock au féminin.

 » Jack White m’a fait entrer dans le XXIe siècle« , avoue l’inoxydable Américaine, sortie de sa torpeur évangéliste, sur le livret de The Party ain’t Over. La galette voit Mamy Wanda, 73 ans, faire péter le Shakin’ All Over de Johnny Kidd and the Pirates, tanguer le Busted cher à Johnny Cash et Ray Charles, et pleurer le You Know I’m No Good d’Amy Winehouse. Rien d’extrêmement original certes. Mais un album sacrément bien foutu qui semble autant être celui de monsieur Jack que le sien. Et peut-être même qu’il est moins le sien que celui de monsieur Jack.

White a suggéré la plupart des morceaux. Demandé à Dylan laquelle de ses chansons il filait à Wanda (réponse: Thunder on the mountain). Enregistré la « vieille » à Nashville dans son propre studio. Et rassemblé pour les sessions ses proches et potes. Sa femme, Karen Elson, assure quelques ch£urs. Le mec de Meg, Jackson Smith, joue à l’occasion de la guitare. Tandis que les Raconteurs Jack Lawrence (également membre de Dead Weather) et Patrick Keeler se chargent respectivement de la basse et de la batterie… Un petit disque entre amis en somme. Et l’occasion de tirer le portrait à Wanda Jackson.

The Queen of rockabilly. The First Lady of rock’n’roll. La première femme en tout cas à avoir enregistré un morceau rock, le jubilatoire Let’s have a party, il y a un peu plus de 50 ans sur les conseils de son one time boyfriend (comprenez-y ce que vous voulez, les m£urs ont changé) Elvis Presley.

Wanda naît en 1937, à Maud, dans l’Oklahoma. Son père, Tom, musicien professionnel avant la crise, au début des années 30, emmène sa fille dès la plus tendre enfance voir les grands orchestres de swing et lui offre sa première guitare. Ado, Wanda, découverte par Hank Thompson, a son propre show radio. Elle fait dans la country pure et dure mais le producteur Ken Nelson refuse de lui faire signer un contrat longue durée chez Capitol.  » Parce que les filles, ça ne vend pas de disques. »

Précoce, Jackson a déjà à son actif 3 chansons dans les charts quand elle termine l’école à 17 ans. On est en 1955. Hauts talons, robes à franges. Wanda est la première à porter des tenues flamboyantes. Son père l’accompagne sur la route. Lui sert de manager et de chaperon. Et, un peu perdu, lassé des cachets à 50 dollars, a la grande idée de contacter Bob Neal. A l’époque, Neal a sous sa coupe un jeune artiste prometteur encore inconnu du grand public. Il cherche justement une fille pour tourner avec son poulain. Le gamin s’appelle Elvis Presley.  » Un vrai gentleman, calme, posé« , dit-elle de lui.

Si la ravissante et minuscule Wanda Jackson se retrouve sur la route en compagnie de Johnny Cash, Jerry Lee Lewis, Buddy Holly et Carl Perkins, la jeune femme a tout de suite un faible pour celui qui deviendra le King. Ils passent beaucoup de temps ensemble. Elvis lui explique la révolution rock et l’incite à délaisser la country. Lui fait promettre qu’elle essaiera de chanter le rockabilly.

Trip évangélique

Quand elle signe en 1956 chez Capitol, qui a changé d’avis, Wanda sait qu’elle doit saisir l’occasion. Deux disques, Rockin’ with Wanda et There’s a party goin’ on, sortis en 1960, suffiront à écrire la légende mais pas à garnir son compte en banque.

Le rock, en ce qui la concerne, ce n’est définitivement pas ce qui vend. L’Amérique n’est pas prête pour une chanteuse à la musique rauque. Elle a déjà assez de mal à accepter Elvis. Sauf qu’avec lui, elle n’a pas le choix. Il fait déjà tourner la tête des kids.

Durant les sixties, Wanda, mariée à un consultant en informatique devenu son manager, ne se consacre plus qu’à la country. Elle vit à Nashville. Traîne souvent à Las Vegas. Et cartonne en Allemagne où elle fait la couverture de Bravo, se permettant même de chanter en teuton.

En 1969, My Big Iron Skillet, l’histoire d’une femme qui entend bien se barrer de chez elle, fait scandale. Les choses vont plutôt mal tourner.

Après avoir usé et abusé de l’alcool, titillé la musique du diable, Wanda décide en 1971 de ne plus chanter que pour dieu. D’abandonner la country pour dédier sa vie au gospel. Quand Capitol la lâche, elle enregistre pour de petits labels religieux comme Myrrh et Word. Monte des tournées dans les églises évangélistes. Et avec son Jules se rapproche du seigneur dont ils deviennent d’ardents défenseurs. La vague rockabilly des années 80 la fait redescendre sur terre et lui remet le pied à l’étrier. Jackson joue ainsi régulièrement son vieux répertoire en Europe. Surtout en Scandinavie, en Angleterre et en Allemagne. Elle tourne cependant encore et toujours le dos aux studios.

Il faut attendre 2003 pour entendre son premier album en pratiquement 20 ans. Un disque, Heart Trouble, auquel sont entre autres conviés les Cramps.

Plutôt que de s’étendre sur son album hommage à Presley sorti en 2006, on soulignera que The Sweet Lady with the nasty voice est enfin entrée, en 2009, au Rock And Roll Hall of fame. Grâce au soutien d’un autre Elvis. Costello.

The party ain’t over. Les lumières se sont rallumées mais Wanda Jackson fera la fermeture.

WANDA JACKSON, THE PARTY AIN’T OVER (***), DISTRIBUÉ PAR WARNER.

TEXTE JULIEN BROQUET

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