Entre la source et l’estuaire

Accompagnant son père, conducteur de péniche reconverti dans la revente de bateaux, le narrateur se souvient d’une rencontre au fil de l’eau, avec un homme au visage abîmé par les cicatrices, la peau criblée de trous. Revêche, l’ermite du village s’était laissé amadouer et avait relaté son histoire le temps d’une partie de pêche. Alors âgé d’une trentaine d’années, celui qu’on surnomme Lazare fait la connaissance du couple venu s’installer dans le manoir de ce coin perdu de Franche-Comté. Soixante-cinq ans, fortuné, Endrik Fornblung est un pilote de ligne allemand à la retraite. Russe, de 30 ans sa cadette, son épouse Ouliana subjugue immédiatement. Engagé comme menuisier, Lazare est retenu à dîner, on se lie d’amitié… Jusqu’à lui proposer un pacte l’invitant à rejoindre Ouliana à l’étage:  » Rends ma femme heureuse, dans sa chambre (…) » . À travers les méandres de l’âme humaine, les lecteurs embarquent pour une traversée tourmentée. Dans un récit mouillé d’acide, bordé de camaïeux verts et bleus, Domenach remue la vase d’un village de la France profonde, se pique d’impressionnisme régional où la bile du ragot, cet  » art des gens sans passion » , a fait son lit. Odeur de tabac, de cuir usé, charriant les sables mouvants de la rumeur, ce conte moral au charme désuet emmène son lecteur à bon port.

De Grégoire Domenach, éditions Le Dilettante, 192 pages.

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