C’ÉTAIT L’UNE DES SORTIES LES PLUS ATTENDUES DE 2016. ET ELLE LE RESTE. ANNONCÉ LA SEMAINE DERNIÈRE, LE NOUVEL ALBUM DE FRANK OCEAN SE FAIT ENCORE ET TOUJOURS DÉSIRER. FANS AU BORD DE LA CRISE DE NERFS…

Encore un coup dans l’eau. A l’heure d’écrire ces lignes, et alors que sa sortie était pourtant prévue vendredi dernier, le nouvel album de Frank Ocean n’a toujours pas apparu. Cela devait être un peu la cerise sur le gâteau. Dans une année particulièrement mouvementée, parmi les plus étranges de la décennie en cours, avec ses disparitions choquantes d’un côté, ses albums événementiels de l’autre, il ne manquait en fait plus que lui.

Certes, le disque avait déjà été annoncé auparavant, avant d’être systématiquement reporté. Cette fois cependant, c’est le très prestigieux New York Times qui révélait que Boys Don’t Cry devait atterrir sur le site de streaming d’Apple dès le 5 août. Une piste sérieuse donc. Pendant toute la journée, Internet a donc bruissé. Pour rien. Fiasco monumental ou teasing ultime? Les fans sont partagés. Il ne faudra probablement pas que ce genre de péripéties se reproduisent encore souvent, au risque de lasser. En attendant, le geste a permis de démontrer que, quatre ans après la sortie de son premier album officiel, Frank Ocean suscite toujours des attentes énormes. Rappel des faits.

Rénovation r’n’b

Né Christopher Edwin Breaux (1987), Frank Ocean a grandi à La Nouvelle-Orléans, avant de devoir déménager à Los Angeles, après le passage de l’ouragan Katrina. Là, il signe un premier contrat en tant qu’auteur et commence à écrire pour d’autres (Justin Bieber, Beyoncé…). C’est en 2011 qu’il se décide à sortir de l’ombre, avec Nostalgia, Ultra. Diffusée gratuitement sur le Net, la mixtape fait une telle impression qu’elle termine dans plusieurs classements des meilleurs albums de l’année. Le disque symbolise un r’n’b alors en pleine rénovation. Longtemps honni pour ses roucoulades sentimentales, le genre est en effet investi par de nouveaux chanteurs qui en font le refuge d’angoisses plus intimes, plus psychologiques. Certains parlent de r’n’b alternatif. D’autres, plus grinçants, avancent le terme de PBR&B – référence à la Pabst Blue Ribbon, une bière associée aux hipsters. Autant dire une mode…

Avec Channel Orange, son premier album « officiel » publié en 2012, Frank Ocean a cependant prouvé qu’il n’était pas un simple buzz. Mélange de cool californien, de suavité r’n’b et de profondeur soul, le disque enchaîne les morceaux de bravoure, aux structures complexes (Thinkin’ ‘Bout You, Sweet Life, Super Rich Kids, Crack Rock, Pyramids…). Quatre ans plus tard, il sonne toujours aussi bien, confirmant ainsi les premières impressions: celles d’avoir en main un classique absolu.

Très tôt, Frank Ocean s’est également ouvert sur sa bisexualité, expliquant notamment que son premier grand amour avait été un homme. Ce coming out n’est pas anodin. Issu d’un milieu musical souvent taxé d’homophobe (et membre d’un collectif de rappeurs, Odd Future, régulièrement accusé de propos sexistes), Frank Ocean a contribué à bouger les lignes. Récemment encore, dans l’une de ses rares sorties, publiée sur son compte Tumblr, Frank Ocean réagissait à la tuerie d’Orlando, qui a fait 49 morts dans une boîte gay. « De nombreuses personnes nous haïssent et souhaiteraient que nous n’existions pas. (…) A cela nous répondons par la fierté et nous exprimons notre amour pour qui nous sommes et pour ce que nous sommes. Parce que, qui d’autres le ferait avec autant de détermination?« 

De là à en faire un porte-parole de la communauté LGBT, il y a un pas. L’homme cultive en effet la discrétion. Alors que la plupart s’agitent pour ne pas se faire oublier, Frank Ocean a passé ces dernières années assez loin des caméras, se contentant de l’une ou l’autre collaboration prestigieuse (Jay Z, Kanye West, Beyoncé…). Réservé, voire timide, l’homme est rare en interview. Sur le Net, il snobe allègrement les réseaux sociaux les plus populaires, comme Twitter ou Facebook. Il préfére limiter ses interventions à la plateforme de microblogging Tumblr, sur laquelle il laisse des messages souvent vagues, voire carrément énigmatiques.

Ce fut encore le cas cette fois-ci, avec une mystérieuse vidéo en noir et blanc, le montrant en train de bricoler dans un atelier (dans le fond, on aperçoit également un mur de haut-parleurs, sorte de boombox géante -en fait une installation de l’artiste new-yorkais Tom Sachs). Sur le coin supérieur droit, le logo d’Apple music semblait confirmer l’info du New York Times. Las, le successeur de Channel Orange est toujours coincé dans les limbes. Allez, Franky, maintenant, c’est bon

TEXTE Laurent Hoebrechts

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