L’actrice campe une saisissante femme en phase de déconstruction dans L’Autre, de Patrick Mario Bernard et Pierre Trividic.

Actrice rare sur les écrans, Dominique Blanc est aussi de celles dont chaque apparition laisse une marque profonde. La dernière ne fait pas exception qui, dans L’Autre de Patrick Mario Bernard et Pierre Trividic, la voit camper de frémissante façon Anne-Marie, une femme rongée par la jalousie, au point de bientôt basculer. Un rôle fort – qui devait d’ailleurs lui valoir le prix d’interprétation à Venise – pour un film étonnant, repoussant les frontières esthétiques du drame psychologique. « Le cinéma m’intéresse à partir du moment où il est une aventure, nous expliquait la comédienne, rayonnante, lors de la Mostra. Il faut que ce soit une aventure humaine, esthétique, qu’il y ait quelque chose de neuf et beaucoup d’inconnu. Comme le dit René Char: « Comment vivre sans inconnu devant soi? » Cette part d’inconnu, c’est ce qui me rend le cinéma précieux. »

Ses réalisateurs de L’Autre, Dominique Blanc les a découverts à la faveur de Dancing« une espèce d’ovni dans la production française ». Le désir de travailler ensemble est réciproque – « c’était tout à fait partagé, ce qui est extrêmement intimidant, en fait » – et se cristallise autour de l’adaptation du roman L’occupation d’Annie Ernaux. « Quand ils m’ont donné le livre, je leur ai dit ne pas voir du tout comment on pouvait fabriquer un film avec ça, mais j’étais très confiante. » Sentiment qui n’allait pas se démentir au gré du travail de préparation dont la comédienne souligne l’étrangeté et le caractère passionnant – « J’ai eu le sentiment de faire du cinéma pour la première fois, il se passait quelque chose d’assez essentiel. Je me suis sentie très libre, peut-être comme jamais, parce que j’ai l’impression qu’avec eux, on peut tout faire, tout jouer, tout offrir, tout sera formidablement regardé, écouté, entendu, et c’est si rare… »

Cette qualité rejaillit d’ailleurs sur l’écran. « Chaque fois que je disais: « ça, je ne l’ai jamais fait », ils y allaient », observe l’actrice, amusée. Processus qui ne s’arrête pas au simple fait de la découvrir pour la première fois en blonde, mais tient à la chair même d’Anne-Marie. « J’ai toujours été extrêmement sensible, dans mes choix, aux personnages qui connaissent la solitude et la détresse. Je ne peux pas me refaire. (rires) Mais je voulais essayer d’inventer quelque chose de différent à partir de la jalousie. » Avec, à la clé, un exceptionnel portrait de femme au bord de la déconstruction. « Mon père était accoucheur. Un jour, je lui ai dit qu’au fond, on faisait le même métier: lui avait mis au monde des existences toutes nouvelles, et moi je donne chair et corps à une personne qui n’est pas un nouveau-né, mais qui est une personne. La comparaison ne lui a pas plu du tout. » (rires)

L’Autre de Patrick Mario Bernard et Pierre Trividic, à l’affiche depuis le 01/07.

J.F. PL.

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