Faire des films au Congo? Compliqué mais possible. Grand espoir du cinéma congolais, Djo Munga vient de boucler le tournage de son premier long.

Djo Munga reçoit chez lui, dans un quartier calme de Kin. Sur la table du salon, des piles de DVD: In The Mood For Love, un box David Lean… Il est passé 21 h, le réalisateur vient d’achever l’ultime réunion de travail de la journée. A l’ordre du jour: son projet de long métrage, Viva Riva!. « L’histoire d’un jeune au coin de la rue, qui veut vivre vite et fort ». Avec l’objectif avoué de faire un film « qui soit à la fois local, tourné en lingala, mais qui ait également une dimension universelle ».

Né à Kinshasa (1972), Djo Munga est considéré comme le grand espoir du cinéma congolais. Si tant est qu’une telle chose existe, diront certains. D’ailleurs, on a beau être attentif, les rues de Kinshasa ne semblent pas abriter la moindre salle obscure. « On ne mesure pas bien les dégâts qu’a causés le mobutisme. Au-delà de son aspect brutal, il a démantelé toutes les institutions. Pour avoir du cinéma, il faut qu’il y ait des salles, des gens pour les tenir… «  Le mobutisme, c’est justement ce que Djo Munga fuit quand il a 9 ans. Il débarque alors en Belgique. A Bruxelles, il passe par Saint-Luc, puis l’Insas. Avant de repartir comme prévu au pays. « Je n’ai jamais pensé rompre ce « contrat moral ». Peut-être que si la Belgique avait eu à ce moment-là une police moins agressive… »

Made in Congo

Il revient donc vers 1999, « les pires années ». « Il régnait une misère sans nom, plus aucun projet n’était possible ». Entre-temps, il participe à la production d’une série de documentaires, pour la BBC ou Arte, avant de monter sa propre structure. Casse-cou dans un pays exsangue comme le Congo? « En Europe, il y a une organisation, une vision du cinéma… Comment l’adapter à la réalité congolaise? Ici, qui a de l’argent par exemple? Entre autres la coopération, les ONG, qui font un peu office de service public. «  Djo Munga se lance donc dans le documentaire social. En veillant au passage à déniaiser une approche parfois très « arriérée » de la communication pratiquée par ces ONG. Pour Papy, vu notamment au festival de Namur, il écrit par exemple une fiction autour du témoignage d’un policier atteint du virus du sida.

L’étape suivante est donc le long métrage, entièrement made in Congo. Avec les aléas de rigueur. En 2006, alors que l’un des producteurs européens est en route pour assister aux premiers repérages, les combats éclatent dans Kinshasa… Ce n’est plus d’actualité, mais les problèmes restent nombreux. « Le plus grand défi n’est pas matériel. Il est d’abord de changer les mentalités. » Débuté en décembre, le tournage de Viva Riva! s’est terminé la semaine dernière. De bon augure. « On avance au jour le jour. La porte s’est ouverte, mais cela reste fragile. Je pense néanmoins que le cinéma congolais a de l’avenir. Simplement parce qu’il y a énormément d’histoires qui n’attendent qu’à être racontées. »

Texte laurent hoebrechts

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