Défense de Prosper Brouillon

D’Éric Chevillard, illustré par Jean-François Martin, éditions Noir sur Blanc, 104 pages.

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Essai déguisé? Faux roman? Pamphlet satirique? Défense de Prosper Brouillon est un peu tout cela à la fois. Sous couvert de rendre justice à l’auteur populaire des Gondoliers et d’Écrire et tricoter, c’est pareil, le narrateur-procureur se lance dans un réquisitoire tranchant contre les ratés, les aigris, les méprisants -comprenez les journalistes et les écrivains maudits- qui peuplent le monde de l’édition et jalousent ce romancier (fictif) de génie. « Il plaît, et c’est ce qui déplaît« , ironise le panégyriste. Qui ne se contente pas d’étriller toutes métaphores dehors la faune et la flore germanopratines -« La beauté ne se montre plus ici que très fanée. On vide de grands verres de venin à la terrasse du Flore, les bras mous ondulent comme des serpents sur les tables, les langues bifides sifflent de minces imprécations: il doit être question de Prosper Brouillon.« -, il y ajoute une étude détaillée -un peu trop pour nos estomacs délicats- de la pâtée littéraire de son idole, citations de plus en plus grotesques (et toutes tirées de romans publiés ces dernières années comme l’indique malicieusement l’ex-feuilletonniste du Monde des Livres) à l’appui. Un exemple? « Alors elle éclata en sanglots, des sanglots saccadés, comme des vomissements de larmes. » À la manière d’un Botul, Éric Chevillard persifle et signe, faisant mine de flatter ces écrivains à la prose anémique pour mieux en souligner l’indigence. Un exercice de salubrité littéraire.

L.R.

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