LE TRIO ANGLAIS, EN VISITE LE 4 FÉVRIER À L’ANCIENNE BELGIQUE, SORT UN ALBUM DE POP ÉLECTRONIQUE GLACÉE ET RADIEUSE.

Dark Star. L’étoile noire. Derrière ce nom emprunté à une comédie de science-fiction écrite, réalisée et produite par John Carpenter au beau milieu des seventies, s’étaient déjà caché un éphémère groupe de rock psychédélique anglais fin des années 90, et un projet de métal progressif cofondé par Dab Rock de Psychotic Waltz. Darkstar est aussi, depuis 2006, un projet électronique londonien. Trois ans après North, leur premier album sorti chez Hyperdub (le label de dubstep fondé par Kode9), James Young, Aiden Whalley et James Buttery nous reviennent avec News from Nowhere. Et nouveauté, ça se passe sur Warp, tanière d’une électronique soignée et souvent cérébrale.

« Warp constitue une partie importante de mon éducation musicale, raconte James Young attablé avec ses comparses au restaurant de l’Ancienne Belgique. J’ai commencé avec Nightmares on Wax et Aphex Twin. Après je suis passé à LFO. Des trucs comme Boards of Canada. Et plus tard les Grizzly Bear, Hudson Mohawke, Flying Lotus… » « A un moment, on s’est demandé si notre groupe était assez bon pour paraître sur pareille écurie, avoue James Buttery. On s’est donc mis un peu de pression supplémentaire sur les épaules. »

A part du Warp, il y a dans l’ADN des Darkstar de la house, du trip hop, de la drum’n’bass et du hip hop. Du Tribe Called Quest, du Massive Attack, du J Dilla et du David Bowie…

« Nous sommes aussi de grands fans d’Animal Collective, de Panda Bear et d’Avey Tare, reprennent-ils d’une seule voix. On aime leur approche. Leur manière de se comporter sur scène. Ils ont apporté de nouvelles idées. Une nouvelle manière d’être un groupe électronique. Pour notre nouvel album, l’intention était plus dans le son qu’autre chose. Nous voulions continuer à explorer. Mais explorer avec davantage d’optimisme. »

North avait été enregistré à Londres dans leur petit appartement. Pour News from Nowhere, Darkstar a eu un peu plus de pognon, et s’est permis une retraite à la campagne dans le Yorkshire.

Merci Warp? « Le label nous a filé un peu d’argent. Mais comme on a arrêté de tourner pour se consacrer au disque, on a aussi arrêté de gagner du fric avec les concerts, explique James Young. On s’est barrés pour échapper à la pression de Londres, épargner de l’argent et avoir un peu plus d’espace. Le disque est né dans un village isolé. Une grande maison au loyer abordable. Nous avions une pièce réservée pour la musique. Un piano, beaucoup de guitares et d’équipements. »

Dans la capitale anglaise, les Darkstar vivaient sur une artère principale dans un appart au-dessus d’un magasin d’Hackney, un des districts frappés par les émeutes de 2011: « Pour tout vous dire, on se barrait le jour où les riots ont commencé, se souvient James Buttery. On était assis dans la bagnole et on croisait éberlués toutes les voitures de flics. Ce qui nous a surpris, ça a été l’ampleur des événements. Leur violence aussi. La révolte n’a pas duré une journée. Elle s’est étendue sur une semaine. Le gros problème, c’est qu’il n’y avait pas de cause derrière ce mouvement. Juste de la cupidité. Du profit personnel. Le seul truc positif fut la réaction de ceux qui n’y ont pas pris part et ont nettoyé la ville. Un esprit de camaraderie est né en réaction. Le plus fou, c’est qu’on a vu tout ça à la télé au milieu de nulle part. »

Paris à 50 livres

Mise au vert ou pas, la gestation de News from Nowhere produit par Richard Formby (Egyptian Hip Hop, Wild Beasts) n’a guère été une sinécure. « On a bossé. Bossé. Et encore bossé. Un peu plus d’un an. Sans ami. Sans vie sociale, résume Young. On trimait tous les jours. Ai-je eu envie d’en tuer l’un ou l’autre? Parfois. Les sujets de conflit sont les mêmes que dans un couple. Qui fait les lessives? Qui lave les plats sales traînant dans la cuisine? »

La principale distraction des zigotos fut les séries télé. Games of thrones, Breaking Bad, Boardwalk Empire… Les séries télé et les paris à 50 livres. Sur tout et n’importe quoi. « Le nom d’un acteur dans un film. Le nombre de dragons dans le Trône de fer »

Plusieurs facteurs viennent éclairer cet accouchement long et difficile. « Il a d’abord fallu comprendre ce que nous voulions vraiment devenir. Puis, on pensait bosser avec Tim Goldsworthy à Bristol mais ça ne s’est pas concrétisé. » Pour pimenter le tout, James Buttery s’est cassé le dos en chargeant le van… « J’ai été coincé pendant trois ou quatre mois. Mais j’écrivais dans mon lit. Au final, cet accident nous a laissé du temps. Nous n’étions pas pleinement satisfaits et nous n’aurions jamais eu l’occasion de sortir dans les délais un disque complètement assumé.Nous ne sommes pas croyants mais c’était presque une action divine… A tous les groupes qui lisent cet article: si vous avez du mal à terminer votre album, blessez-vous sérieusement. Ça vous laissera un peu de rabais… Soyez juste prudents dans ce que vous faites. Il doit s’agir d’une fracture propre et nette. Si vous voulez, on casse des jambes pour pas cher! »

LE 04/02 À L’AB CLUB.

RENCONTRE JULIEN BROQUET

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