D’allumettes et d’écailles

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A Barcelone, Désirée aurait tout pour être amie avec Yési Lugano: toutes deux «Gémeaux de cuvée olympique» (nées en 1992), elles fréquentent la même école. Mais la narratrice considère les choses différemment: on lui a toujours brandi la fille d’Isabelle comme un exemple à suivre. Brillante, mignonne, populaire, excellente violoniste. Sa mère chante tellement ses louanges qu’elle pense ne plus rien avoir à apprendre. Mais un soir de 2008, alors même que l’horoscope promet un «été initiatique», sa rivale est enlevée. Le quartier est aux abois. Aussi mystérieusement qu’elle avait disparu, Yési ressurgit le 9 juin 2013, en vie mais transformée intérieurement, privée de son rayonnement. On compte sur celle qui l’observe en coin depuis toujours pour trouver une explication. C’est depuis l’atelier d’écriture créative du centre pénitentiaire de Wad-Ras que nous sont racontés les faits: il semblerait en effet que ce retour n’ait pas laissé des stigmates que sur celle des deux qui a été kidnappée… Avec un sens louvoyant du suspense, Berta Marsé joue avec les trajectoires croisées – faussement prédéfinies – de celles «qui ne furent jamais comme les doigts de la main. Doigt et écharde à la rigueur». Entre culpabilité à demi-mot et construction qui brouille les pistes, le roman garde longtemps ses énigmes intactes.

De Berta Marsé, éd. Christian Bourgois, traduit de l’espagnol par Jean-Marie Saint-Lu, 224 p.

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