L’attaque des clones – Publié en 2005 aux USA, Clones voit le jour chez nous à la faveur de la sortie de son adaptation ciné, avec Bruce Willis dans le rôle titre -normal, le monde est en péril…

De Robert Venditti et Brett Weldele, Éditions Delcourt.

« Il y a quelque chose d’intéressant et d’unique en chaque chose. En tant qu’auteur, c’est ça que tu dois rechercher. » Dans le futur lisse et technologiséde Clones, la première BD scénarisée par Robert Venditti, ce quelque chose d’intéressant et – à fortiori – d’unique est loin de sauter aux yeux. Et c’est tout le talent du jeune scénariste que d’être parvenu à y faire germer, au fil des pages, vie et émotion, comme une fleur fragile déployant patiemment ses charmes sur un tas de fumier virtuel.

Nous sommes en 2054. La fusion de la réalité virtuelle et de la cybernétique a précipité l’humanité dans une ère nouvelle, où le moindre geste de la vie quotidienne a été délégué à des répliques androïdes. Jusqu’au jour où un techno-terroriste décide de bousculer les choses en profondeur, liquidant les clones les uns après les autres…

 » J’ai étudié l’écriture, raconte Venditti. Dans le cadre de mes cours, j’ai lu l’ouvrage d’un auteur qui avait suivi des gens complètement mordus d’Internet, de tout ce qui est jeux en ligne, chats, etc. Des gens tellement accros qu’ils en perdaient leur job, divorçaient. Là derrière, je percevais déjà ce désir primaire de vivre une autre vie que celle qui est la nôtre. Et puis toutes ces émissions de téléréalité en lien avec la chirurgie plastique, auxquelles les gens participent dans l’espoir de devenir littéralement quelqu’un d’autre, ont commencé à rencontrer un succès incroyable aux States. Ces deux choses, le livre d’un côté, les émissions de l’autre, se sont mélangées dans ma tête et j’ai pensé: qu’est-ce qui se passerait si la technologie nous permettait de rester chez nous, connectés à des machines qui pourraient aller travailler à notre place ou emmener notre femme à dîner? Et à quoi ressemblerait le monde si chacun vivait sa vie à travers ces machines? »

En résulte un album foisonnant, fondant ces réflexions quasi sociologiques dans un mix d’enquête policière et d’univers SF.  » Je pense que Clones est avant tout une histoire policière. Pour être honnête, je n’ai aucun background en SF. Mais le récit s’avérant résolument anticipatif, il impliquait de développer un univers SF en toile de fond.  » Clones s’inscrit ainsi dans la plus pure lignée des detective novels tout en évoquant aussi bien le Brave New World d’Huxley que le Do Androids Dream of Electric Sheep? (le livre qui a inspiré Blade Runner) de Philip K. Dick.

Bruce tout-puissant

Conçue dès le départ comme une trilogie – le prequel est déjà sorti aux States, le sequel est en cours d’élaboration -, la franchise Clones devrait finalement compter 5 albums. Il s’agirait donc ici des simples prémices d’une £uvre qui s’annonce pour le moins touffue. Un album agrémenté, un peu à la manière d’un Watchmen, de fausses coupures de journaux, de fausses publicités, mais dont la cover est étrangement illustrée par une image tirée du film qui s’en inspire aujourd’hui…  » C’est quelque chose de très courant aux Etats-Unis. Ce n’est pas un problème pour nous. Et puis je crois que la tête de Bruce Willis est nettement plus vendeuse que nos noms (rires) .  » Justement, quand on leur demande leur avis sur le film de Jonathan Mostow, qui s’autorise de nombreux écarts enjolivants et autres raccourcis blockbusterisants par rapport à la BD, les auteurs restent prudents:  » Disons que nous avions déjà raconté l’histoire exactement de la manière dont on le souhaitait, donc oui nous sommes ok avec les changements opérés. Et puis, même si le film est clairement plus orienté action, ils ont conservé les thèmes essentiels. Je veux dire, c’est pas une comédie romantique non plus (rires) . » Pour sûr…

Nicolas Clément

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