Le plus original des cinéastes d’animation anglo-saxons a créé un univers propre, dont les délires nous renvoient régulièrement à nous-mêmes…

Invité d’honneur d’Anima 2009, Bill Plympton attribue au climat pluvieux de Portland, la ville de l’Oregon où il a passé son enfance et son adolescence, une part importante dans son cheminement vers l’image et l’imagination. Fils de banquier, flanqué de deux frères et trois s£urs, il prit l’habitude de s’adonner au dessin quand il faisait trop moche pour aller jouer dehors. C’est-à-dire très souvent! Son don pour l’illustration, son imaginaire singulier, apparurent très vite, et se développèrent au club artistique du lycée, puis surtout à l’Université d’Etat de Portland. C’est là qu’il fit ses premiers pas dans l’animation, réalisant pour le « yearbook » dont il avait la charge un petit film promotionnel… qu’une erreur technique rendit malheureusement inutilisable!

Avant de s’imposer comme un des créa-teurs les plus géniaux de l’anima-tion contemporaine, il restait au jeune Bill à réussir deux choses. D’abord éviter d’aller mourir au Vietnam, ce qu’il fit en s’engageant plutôt dans la Garde Nationale (il allait y servir de 1967 à 1972). Ensuite se trouver un gagne-pain en rapport avec ses désirs et talents. New York l’accueillit et il s’y fit rapidement un nom comme illustrateur et caricaturiste, publiant ses dessins dans des magazines de cinéma mais surtout dans le New York Times, Vogue, The Village Voice, Vanity Fair, Screw, Rolling Stone, The National Lampoon, Penthouse et Glamour! Sa bande dessinée politique hebdomadaire simplement appelée Plympton, et lancée en 1981 dans The Soho Weekly, allait être relayée par une vingtaine de journaux dans tout le pays!

Mais l’animation gardait une place précieuse dans le c£ur de celui qui, à l’âge de 14 ans, avait envoyé à Walt Disney certains de ses dessins, offrant ses services et se voyant répondre qu’il était trop jeune pour devenir animateur… A 37 ans, il jugea que ce n’était plus le cas et se lança enfin dans l’aventure des images animées. Boomtown, court métrage de commande sur une chanson de Jules Feiffer, marqua ses débuts et réveilla en lui un démon de l’animation qui n’allait plus cesser de s’activer. Avec leur trait vif et audacieux, leur mélange de réalisme et de poésie sauvage, leur humour très noir, leur sens du décalage (volontiers cruel) et de la satire acerbe, les « courts » de Plympton (comme Your Face, How To Kiss et 25 Ways To Quit Smoking) firent craquer la planète, du Festival de Cannes aux Oscars en passant surtout par la télévision avec l’appui enthousiaste de l’alors très créative chaîne musicale MTV.

Depuis 1992, Plympton nous offre des longs métrages épatants, intrigants, drôlissimes et/ou inquiétants, marqués d’une liberté de ton et d’ins-piration unique. I Married A Strange Person! (1997), Mutant Aliens (2001) et Hair High (2004) ont notamment et brillamment précédé le tout neuf Idiots And Angels, que l’ami Bill présentera à Bruxelles. Un film plus sombre que les précédents, une fable au trait écorché sur la méchanceté contemporaine et l’espoir ténu de voir surgir le bien. Une £uvre qui nous tend un miroir déformant, certes, mais une fois de plus pertinent…

www.plymptoons.com

www.awn.com/plympton

Texte Louis Danvers

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