Fontaine de jouvence – À 70 ans, Brigitte Fontaine ne lâche rien. Avec son nouvel album, elle repart à l’attaque, fidèle à son image de diva punk de la chanson française.

« Prohibition »

Distribué par Universal.

La Fontaine est de retour. Trois ans après Libido, la Tatie Danielle de la chanson française sort Prohibition. Toujours bien barrée, plus unique que jamais, seule sur sa planète musicale. Ce personnage d’extraterrestre de la scène française, elle l’a cultivé, notamment lors d’apparitions télévisées azimutées. Mais y a-t-il vraiment quelqu’un pour lui en contester la sincérité? Brigitte Fontaine est réellement cette artiste baroque, un peu zinzin, poétesse héliophobe, aussi lunaire que lunatique. Paraît que la dame a aujourd’hui passé le cap des 70 ans. Ah bon?  » Je suis vieille et je vais crever« , souffle-t-elle d’ailleurs ( Prohibition). Certes, faudra bien que cela arrive. En attendant, avant les clous de son cercueil, Brigitte Fontaine continue d’enfoncer celui d’une carrière de plus de 40 ans. Quatre décennies à s’agiter en électron libre. Une marque de fabrique. Un fonds de commerce. C’est selon. Ce n’est en tout cas pas aujourd’hui que cela va changer.

Après avoir dévoilé son intérieur, dame Fontaine se tourne vers l’extérieur. Un album politique, c’est le gimmick affiché en lettres d’or tout au long de la retentissante campagne promo française. La chanteuse y va donc de ses coups de gueule, raccords avec sa personnalité d’anar’ rive gauche, volontiers misanthrope. On la voit venir de loin, la mère Fontaine. Prohibition, c’est « il est interdit d’interdire » version 2009 ( » L’enfer, c’est l’Etat« , Dura Lex ou encore  » Ouvrez les prisons, elles nous tuent« , Je suis un poète). Avec en ligne de mire: le jeunisme, l’hygiénisme, le moralisme, et tous les autres -ismes sous lesquels chacun ploie et plie. Quitte à ce que la chanteuse cède parfois à la provoc’ à 2 balles et la rime à 2 sous (le déjà fameux  » Je suis vieille et je vous encule/avec mon look de libellule » sur Prohibition).

BIoc de marbre

Brigitte Fontaine, c’est donc cette petite « vieille » à baskets un peu vulgaire, qui continue à cracher sa rage. Mais pas seulement. Sa fantaisie n’est pas que revendicatrice. Ou en tout cas pas toujours aussi frontalement. Entre guillemets est d’abord ludique, et La fiancée de Frankenstein a beau raconter une histoire d’une tentative loupée de suicide, elle arbore un sourire doux-amer, un peu à la Vian.

Et puis, il y a aussi Fontaine plus posée. Elle occupe le c£ur du disque. A mi-parcours, l’album change en effet de tonalité. Areski Belkacem, compagnon fidèle de la Fontaine, lui tisse des trames musicales moins sautillantes, plus filandreuses et aventureuses. C’est Harem et sa poésie capiteuse, Soufi auquel se joint Grace Jones, ou encore Pas ce soir, aux mots pour une fois dénudés:  » L’amour, c’est ça/ce n’est pas un bloc de marbre/dressé devant la mer. »

Alors oui, Brigitte Fontaine agace. Evidemment. Heureusement. En 69, elle déclarait dans une interview que, dans son art,  » ce qui importe, c’est de recevoir un souffle, un parfum… » Quarante ans plus tard, il est plus personnel que jamais.

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