Il y a 15 ans, dEUS faisait sortir le rock belge de sa torpeur. Disque fondateur, son premier album ressort ces jours-ci, toujours aussi fulgurant.

Début des années 90. Après l’atterrissage d’une série de francs-tireurs (TC Matic, Allez Allez, les Tueurs de la lune de miel…), le rock belge est redevenu une blague, un pays sous-développé sur la carte du rock mondial. Au même moment cependant, une nouvelle scène anversoise commence à s’agiter. Une série de musiciens qui ont pris l’habitude de se croiser au Muziekdoos, café de la Métropole connu pour ses concerts improvisés payés au chapeau. C’est là que se retrouvent Tom Barman -joueur de squash hyperkinétique qui a décidé de rediriger son trop-plein d’énergie dans la musique après être tombé sur un disque du Velvet Underground -, Stef Carlens – petit prince de la bohême musicale locale -, et Rudy Trouvé – guitariste qui canalise ses anxiétés à coup de joyeux larsens. Rejoints par Jules De Borgher (batterie) et Klaas Janzoons (violon, piano), ils forment dEUS, groupe lancé quelques temps plus tôt par Barman. Ils sont jeunes, volontiers arrogants. En tout cas ambitieux. Pourtant, ils galèrent avant de trouver un contrat. Finalement, c’est le label wallon Bang! qui décide de miser sur les Anversois. En décembre 93, le groupe peut ainsi s’enfermer en studio. La suite est connue: quand Worst Case Scenario sort en février 94, il intrigue jusqu’aux pontes de Island, le label de Bob Marley et U2, qui bientôt signe les Belges. L’époque est bénie. L’industrie du disque vit alors un de ses derniers grands cycles de prospérité. Avec le succès de Nirvana, elle s’est rendu compte que le rock indépendant pouvait aussi rapporter gros. Worst Case Scenario profite de cet élan et se vend ainsi à près de 300 000 exemplaires, trouvant une audience mondiale.

Quinze ans plus tard, WCS ressort, remastérisé (même la pochette a été reliftée par Rudy Trouvé), et augmenté d’un second CD/DVD. Au menu, des inédits (dont le fameux premier single Zea, vendu une fortune sur eBay) et un docu retraçant la genèse d’un disque qui reste d’une pertinence rare. Chansons insubmersibles ( Via, Suds & Soda, Hotellounge…), subtil équilibre entre expérimentation et fulgurances mélodiques, bruitisme et accessibilité… WCS a ouvert une brèche dont profitent toujours aujourd’hui nombre de groupes, flamands et francophones. Entre-temps, dEUS a su faire aussi bien. Voire mieux? Pas sûr…

dEUS, Worst Case Scenario Deluxe, Universal.

L.H.

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