Le réalisateur d’Une liaison pornographique et de La Femme de Gilles.

Focus: qu’a pu représenter le Musée du Cinéma dans votre formation cinématographique?

Frédéric Fonteyne: c’est Henri Sonnet, qui nous donnait des cours d’histoire du cinéma en première année à l’IAD, qui nous a parlé de la cinémathèque. Je me rends compte qu’elle a fait mon éducation du cinéma. Ma deuxième. La première, c’était les films que je voyais au cinéma, ou à la télévision, dans les émissions de ciné-club. Là, j’ai découvert le cinéma dans son histoire. C’est-à-dire les films qui ne vieillissaient pas. Pendant et après l’IAD, entre les films, j’y allais par période de manière plus ou moins intensive, voir deux films par jour. Ce n’était pas cher. C’était l’époque des VHS, je n’aimais pas voir des films sur une télé.

Avez-vous des souvenirs de films ou de séances qui vous ont particulièrement marqué?

Oui, des films de grands cinéastes qui nous imposent leur rythme. Pickpocket de Bresson, j’ai compris là comment chaque plan était tendu, comportait un rythme qui le liait aux autres. C’était une expérience presque physique. Andreï Roublev aussi de Tarkovski, la scène de la construction de la cloche après deux heures d’errance hallucinée, d’ellipses. Minnie etMoscovitz de Cassavetes, qui reste, je crois, mon film préféré, la scène où Seymour Cassel se coupe la moustache pour prouver son amour à Gena Rowlands. Ariel de Kaurismäki, combien de fois ai-je parlé de ce film à des amis! Peu de gens l’avaient vu. A chaque fois, je sortais de ces films transformé.

Que représente pour vous cette ouverture d’un nouveau Musée du Cinéma, et quels sont son importance/ses enjeux dans le monde d’aujourd’hui?

C’est la réouverture du Musée du cinéma, qui n’a jamais cessé d’exister, même si les projections se faisaient ailleurs pendant les travaux. C’est une chance d’avoir une cinémathèque pareille. Je crois qu’il n’y a pas beaucoup d’endroits comme ça dans le monde. C’est la richesse de la collection de films. La possibilité de découvrir des trésors. C’est un endroit un peu magique. C’est un musée qui propose un écran blanc et une salle noire. Et les images défilent. C’est un lieu où l’on se retrouve un peu comme à la messe, en silence, pour adorer des films. La cinémathèque a toujours été pour moi un lieu où l’on pouvait rencontrer des aficionados, des mordus, des amoureux du cinéma. Un film, c’est fait pour être vu dans une salle de cinéma. C’est une expérience qu’il faut partager sourdement avec d’autres errants qui viennent échouer dans une salle. Ce qu’on peut y voir, c’est l’histoire du siècle, à travers ses désirs. Je crois que le cinéma est un lieu où se confrontent nos désirs. C’est étrange. C’est l’obscurité.

Propos recueillis par Louis Danvers

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