Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

RETOUR EN FORCE – JERZY SKOLIMOWSKI REVIENT DANS L’ACTUALITÉ AVEC 2 FILMS DISTANTS DE 40 ANS. INSPIRATION FULGURANTE ET LONGÉVITÉ PEUVENT FAIRE (TRÈS) BON MÉNAGE…

1 DE JERZY SKOLIMOWSKI. AVEC VINCENT GALLO, EMMANUELLE SEIGNER, DAVID L. PRICE. 1 H 21. DIST: TWIN PICS.

2 DE JERZY SKOLIMOWSKI. AVEC JANE ASHER, JOHN MOULDER BROWN, KARL MICHAEL VOGLER. 1 H 31. DIST: TWIN PICS.

Jerzy Skolimowski, 73 ans et vraiment toutes ses dents, comme l’a prouvé voici quelques mois à peine le féroce et stupéfiant Essential Killing. Quoi de plus mordant, en effet, que ce thriller à haute intensité d’adrénaline mettant en scène une chasse à l’homme peu banale? Le fuyard a été arrêté par les troupes américaines en Afghanistan. Soupçonné de terrorisme, il a été conduit dans un centre de détention, puis transféré vers un autre, en Europe de l’Est. Un accident survenu durant ce transport lui offrira la chance de s’échapper. Seul dans une forêt inconnue, légèrement vêtu dans le froid glacial et la neige, avec à ses trousses des soldats et des chiens, il lui faudra courir. Et survivre. Tuer pour survivre, aussi… Le grand cinéaste polonais a eu l’idée du film en ayant lui-même un accident de voiture, sur une route enneigée non loin de chez lui. Ayant entendu la rumeur situant dans la région un centre d’interrogatoire clandestin de la CIA, il a imaginé ce que pourrait être la fuite d’un détenu affolé, dépaysé, privé de tout repère et n’ayant plus que l’énergie basique, élémentaire de son instinct de survie. Prix spécial du Jury au Festival de Venise, Essential Killing a trouvé en Vincent Gallo l’interprète idéal, un acteur prêt à payer de sa personne dans un contexte de tournage éprouvant. Ce film terrible et extrême, d’une paradoxale beauté formelle et d’une grande puissance émotionnelle, a marqué le retour en force d’un réalisateur qui s’était arrêté de tourner durant… 17 ans!

Après comme avant

Plus d’une quinzaine d’années s’étaient en effet déroulées entre Ferdydurke (une commande de 1991, qu’il regretta cruellement) et Quatre nuits avec Anna, son film suivant tourné en 2008 et qu’ Essential Killing a suivi de près. Les hasards des sorties digitales font réapparaître aujourd’hui un des meilleurs films de la « première carrière » de Skolimowski. Réalisé au tout début des années 70, Deep End a pour personnage principal un adolescent de 15 ans qui trouve un job dans une piscine londonienne (le titre fait référence à la « grande profondeur ») et que la collègue plus âgée chargée de lui montrer les lieux ne laissera pas longtemps indifférent. Entre ces deux-là va se développer une relation étrange, où fantasme et manipulation prendront une dimension dangereuse, obsessionnelle… Admirablement maîtrisée par un Skolimowski au sommet de son style, cette £uvre prenante n’a pas pris une ride, même si l’air du temps s’y fait largement respirer (on peut y voir l’envers du « swinging London », son versant noir). Et si Essential Killing ne propose aucun bonus, celui de Deep End offre plusieurs suppléments précieux. A commencer par un long (1 h 15) documentaire revenant sur la production et le tournage du film, avec plusieurs témoignages dont celui du réalisateur. Mais on découvre aussi plusieurs scènes « perdues », un hommage rendu par… Etienne Daho, et un court métrage très rare avec l’actrice de Deep End Jane Asher. Passionnant! l

LOUIS DANVERS

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