Féroces tropiques

RÉCIT DE VOYAGE | « La toile, la houle, je ne connais d’autre paysage ni d’autre langage. La folie des hommes, j’ai donné. Elle m’a pris, rien appris. » Automne 1913: à l’aube d’une guerre qui ne dit pas encore son nom. Heinz von Furlau, 20 ans, transpire la singularité au sein de l’équipage résolument viril d’un navire allemand parti en mission océanographique. Esthète parmi les béotiens, il peint les hommes, les visages. Lassé de la discipline excessivement coercitive qui règne à bord, le jeune artiste s’abandonnera bientôt, heureux, à son émerveillement pour la Papouasie et ses habitants. Mais la fureur du monde en a décidé autrement, et voilà Heinz de retour sur le Vieux Continent, plongé dans l’horreur et la violence des tranchées…

Le dessin, magnifique, flamboyant, de Joe G. Pinelli manque de lisibilité. Mais c’est la prose, lestée d’humanisme béat, du journaliste Thierry Bellefroid qui pose ici essentiellement problème: trop écrite, trop instruite, trop prolixe, trop poétique, trop hermétique. Trop. S’agissant d’un peintre embarqué avec une bande de rustres à bord d’un rafiot, puis en terres lointaines, et découvrant bientôt, toute nue, la barbarie profonde qui habite le coeur des hommes, on ne saurait trop conseiller la (re)lecture des Isaac le Pirate de Christophe Blain, autrement mémorables que ces Tropiques, aussi féroces soient-ils.

Féroces tropiques, récit de voyage de Joe G. Pinelli et Thierry Bellefroid. Editions Dupuis.

Nicolas Clément

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