Les Impatients

Maria Pourchet explore dans son quatrième roman une voie extrêmement périlleuse: ausculter la passion soudaine d’une jeune femme arriviste, urbaine au possible et flanquée d’un mari ectoplasmique, pour un scientifique/marin buriné qui, pour tout dire, ne daigne pas répondre à ses avances. Si elle parvient à s’en tirer -avec les félicitations du jury-, c’est sans doute parce qu’elle sait manier comme personne une forme de sarcasme attendri. Elle ne cesse jamais de conserver une réelle tendresse, légitimement railleuse, à l’égard des winners ridicules qu’elle dépeint avec humour, de toute une génération de trentenaires boursouflés de suffisance, projetés depuis les grandes écoles françaises jusqu’aux cimes de l’inanité managériale ou de l’entre-soi politique. Impatients, ils le sont, puisqu’ils sentent bien que le vent devrait en toute logique tourner en leur faveur, là, tout de suite, mais voilà: les vieux barbons prennent racine, les investisseurs prêtent du bout des lèvres, les ressorts du couple craquent, quand la solitude ne commence pas à prendre à la gorge ceux qui ont toujours revendiqué la sacro-sainte indépendance caractéristique des êtres censés planer à mille lieues du plancher des vaches. Très innovant dans sa composition, le roman offre des pages succulentes de justesse comme d’esprit.

De Maria Pourchet, éditions Gallimard, 188 pages.

8

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