Les amours virtuelles de Her, une réalité au Japon

Joaquin Phoenix dans Her © Warner Bros. Pictures
Lola Contessi Stagiaire

Les Japonaises craquent pour les jeux de dragues et autres applications de simulation amoureuse. Ce que Spike Jonze imaginait dans son film Her est devenu réalité au pays du Soleil Levant.

En 2013, Spike Jonze décrivait dans Her l’histoire d’amour de Théodore (Joaquin Phoenix) et du système d’exploitation intelligent de son smartphone. Dans un futur proche, ce divorcé mélancolique nouait une relation profonde avec Samantha (Scarlett Johansson), la voix féminine de son téléphone. Il était pourtant rapidement rattrapé par la virtualité de sa nouvelle amie. Conçue pour évoluer constamment, l’Operating System ne pouvait pourtant pas se maintenir longtemps à l’échelle humaine. La distance entre l’homme et la machine apparaissait alors dans toute sa complexité.

Peut-on se lier à quelque chose d’aussi volatile qu’une voix? Les relations nouées en ligne l’ont prouvé depuis longtemps. De simples messages, images ou échanges vocaux, naissent des relations amoureuses. Serait-ce possible si aucun humain ne se cachait derrière ces interfaces? C’est la question que posait Her. Le film démontrait subtilement la beauté de l’attachement amoureux tout en mettant en évidence les limites d’une relation homme-machine.

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L’engouement des Japonaises pour les jeux de drague apporte une réponse. En ligne ou en applications pour smartphones, ils ont de plus en plus de succès au Japon. Certains, comme Tokimeki kareshi et Sumakare, vont jusqu’à imiter les systèmes de messagerie instantanée pour simuler de véritables conversations avec leurs utilisatrices. Dans la lignée des Sims, elles permettraient aux joueuses de vivre une histoire d’amour idéale. Des jeux similaires existaient déjà au Japon, mais ils étaient principalement destinés aux hommes et mettaient l’accent sur une dimension sexuelle. Il reste à savoir si la tendance va se répandre jusqu’en Europe. Si ces programmes sont déjà accessibles chez nous, le public ne semble pas conquis.

Comme le film de Spike Jonze, ces jeux de simulation amoureuse semblent prouver que l’on peut aimer des êtres totalement virtuels aussi bien que des êtres humains. L’amour à l’ère numérique est défini par Hiroshi Ishiguro, un universitaire japonais ayant participé à la création d’androïdes. Selon lui, « il est tout à fait concevable d’aimer réellement des robots, des personnages virtuels. » Aujourd’hui, « la présence d’un corps d’homme ou de femme n’est plus la condition qui définit un être humain » et celui-ci « n’a pas l’apanage de l’amour« . Mais s’enticher d’une matrice informatique n’est pas sans risques. Si la technique permet de maintenir l’illusion d’un contact réel et d’une interaction, l’homme amoureux fait tout de même face à un logarithme mathématique insensible. Avec de telles applications, on s’enferme dans un simulacre de relation au risque de se couper du monde extérieur. C’est le danger qui est pointé par l’Institut Meiji Yasuda de recherche sur la santé et le bien-être. Selon leur étude, ces jeux de simulation expliqueraient en partie la moindre envie des jeunes de se chercher un partenaire.

Ce que Her prédisait, le Japon l’a réalisé: l’amour peut désormais se décliner au numérique. La science-fiction démontre une fois de plus sa clairvoyance et nous met en garde contre les pièges d’un avenir gouverné par la technologie.

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