La Terraformation 2019

Benjamin Bratton est une des étoiles montantes de la pensée anglo-saxonne. Né à Los Angeles en 1968, Bratton est à la fois professeur aux universités de San Diego et de NYU Shanghai et à la European Graduate School de Saas-Fee en Suisse, mais il dirige aussi, depuis 2017, les programmes du Strelka Institute -un centre d’art moscovite spécialisé dans l’architecture, le design et les nouveaux médias- où il succéda à nul autre que Rem Koolhaas. Son maître-livre, The Stack, un pavé sorti en 2015 où il proposait une théorie complète de la structure numérique enveloppant désormais la Terre, est cité partout -mais seul un petit bout en a été traduit en français, aux presses universitaires de Grenoble. Tout ça pour dire que Bratton n’est pas n’importe qui. Et quand quelqu’un de son calibre décide de publier un petit pamphlet titré La Terraformation 2019 sans aussitôt préciser que la terraformation, c’est beurk, c’est qu’il a de très bonnes raisons de donner un coup de pied dans la fourmilière. De fait, Bratton ne mâche pas ses mots. Face à l’urgence écologique et politique qui constitue désormais notre condition partagée, le monde intellectuel aussi bien que militant semble s’être égaré dans une voie absurde, mêlant appels éthiques à une meilleure cohabitation avec le vivant et plans de survie post-apocalyptiques dignes de La Guerre des boutons. Nulle part, dit Bratton, ne voit-on le début d’une prise en compte de ce qui fait le monde aujourd’hui: les processus de terraformation passés -infrastructures, machineries, industries, logistique sans laquelle notre vie serait tout simplement impossible. Pour sortir du marécage absurde dans lequel nous nous enfonçons, c’est à l’échelle de la terraformation qu’il faut penser la révolution à venir -à peine que ce soient les industriels et les capitalistes, qui, eux, n’ont pas les scrupules vertueux des gentils écologistes, qui raflent la mise. Sommes-nous prêts à imaginer une terraformation alternative? Bratton, lui, l’est. Essentiel.

La Terraformation 2019

De Benjamin H. Bratton, éditions Les Presses du Réel, traduit de l’anglais par Yves Citton et Aurélien Blanchard, 152 pages.

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