Critique

[la série de la semaine] A Teacher, sur Disney+ Star: une liaison dangereuse

Après un film du même nom, Hannah Fidell s’empare à nouveau du sujet délicat d’une liaison entre un professeur et son élève (et ne s’en sort pas si mal).

On est presque surpris que la très prudente Disney+ propose une série au sujet aussi délicat. Claire, jeune trentenaire, est professeure de lettres dans un lycée d’Austin, Texas. Très vite, l’un de ses élèves, Eric, 17 ans, est attiré par cette nouvelle enseignante fraîchement débarquée à la rentrée. Comme dans ses rêves -ou peut-être plutôt ses fantasmes- les plus fous, Claire ne semble pas totalement indifférente. Elle va accepter de lui donner des cours de soutien, et la prof et son élève vont lentement mais inexorablement se rapprocher: Claire va insister pour qu’Eric l’appelle par son prénom, l’emmener visiter l’université du Texas où elle a étudié et qu’il rêve de rejoindre…

A Teacher fut d’abord un film. Comme pour approfondir certains aspects de ce thème de l’amour interdit, creuser la mentalité de ses personnages -bref, ce que le format cinéma ne lui a pas permis- Hannah Fidell a décidé, notamment épaulée par Kate Mara à la production, de le revisiter en une série télévisée. Écrit pour elle, le rôle de Claire va à ravir à Kate Mara (mémorable en journaliste obstinée dans la version US de House of Cards), et Nick Robinson (vu dans Love, Simon) n’est pas en reste en lycéen perdu. Mais curieusement, la passion entre Claire et Eric peine à crever l’écran -elle était par exemple pregnante dans l’excellente Normal People au format similaire (mini-série à épisodes de 20-30 minutes). Que le garçon soit fou de sa charmante prof qui, en plus, semble lui faire du rentre-dedans, on le comprend aisément; c’est du côté de Claire que ça cloche. On nous la montre certes peu exaltée dans sa vie de couple (d’autant que son mari est en pleine crise existentielle), mais on ne voit pas ce qui l’attire véritablement chez Eric au point de mettre en jeu sa carrière entière (sa vie?).

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Domination

Ce que montre par contre parfaitement Hannah Fidell à coups de subtiles contre-plongées et de changements de point de vue, c’est, que Claire le veuille ou non, le rapport de domination à l’oeuvre. Ce qui saute alors aux yeux, c’est le peu de discernement des deux amants. Si heureux dès lors qu’ils sont ensemble, ils en perdent toute notion de gravité. Jusqu’à l’inévitable drame: Claire, pensant naïvement partager son bonheur, va révéler le nom de son amoureux à une collègue amie. La seconde partie de la série s’attardera alors sur les (lourdes) conséquences de tels actes: très directes pour Claire, quasiment mise au ban de la société, plus discrètes mais tout aussi profondes pour Eric.

On est pas certain que la leçon de morale balourde serinée dans le final était nécessaire, mais A Teacher reste captivant de bout en bout. D’autant qu’en plein mouvement #MeToo, elle montre ce fameux rapport de domination sous un autre jour. On pourra y réfléchir et en débattre en fredonnant l’envoûtant Oh Baby de LCD Soundsystem, que la série matraque comme un gimmick.

A Teacher

Drame. Une série créée par Hannah Fidell, avec Kate Mara, Nick Robinson, Ashley Zukerman. Disponible sur Disney+ Star. ***(*)

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