QUATORZE ANS APRÈS AMERICAN HISTORY X, TONY KAYE S’INSCRIT AVEC DETACHMENT DANS L’INEXTINGUIBLE TRADITION DES FILMS ÉVOLUANT EN MILIEU SCOLAIRE.

NICOLAS CLÉMENT

Le final, tragique, de son fameux American History X (1998) s’inscrivait déjà dans le contexte tumultueux d’une école de Venice Beach, le film prenant lui-même la forme d’un devoir de lycéen, avec tout ce que cela suppose de didactisme empesé. Avec Detachment, le réalisateur anglais Tony Kaye ajoute aujourd’hui un nouveau grain à l’interminable chapelet de films situant leur action entre les murs d’une école.

Le milieu scolaire semble en effet faire office de source inépuisable d’inspiration pour les réalisateurs de tous bords. Approche documentaire ( Etre et avoir, American Teen…) ou au réalisme assimilé ( Entre les murs, Ça commence aujourd’hui…), perspective prêchi-prêcha coulée dans la guimauve ( Dangerous Minds, Dead Poets Society…), visées récréatives au parfum d’adolescence ( The Breakfast Club, Ferris Bueller’s Day Off et leurs succédanés estampillés eighties) ou aux poussées musclées de testostérone ( The Substitute, Toy Soldiers…): tous les moyens sont bons pour investir la salle de classe et ses alentours. Le point commun entre ces films aux enjeux résolument variés tenant sans nul doute à la dimension sociologique plus ou moins appuyée qui les sous-tend.

Au nom du père

Tony Kaye ne dit rien d’autre s’agissant de l’origine de son implication dans Detachment:  » Disons que je m’intéresse beaucoup, et ce depuis toujours, aux problèmes sociaux. » L’école valant dès lors comme catalyseur idéalement emblématique de ceux-ci, quand il ne s’agit pas d’épingler explicitement les manquements et dérives de l’institution elle-même. « Detachment rassemble en 90 minutes un certain nombre de choses, certaines fantastiques, d’autres vraiment horribles, dont un professeur remplaçant de L.A. a pu être témoin. Mais entendons-nous bien, si j’avais voulu faire un film sur le système éducatif américain, ce ne serait pas ce film-ci. Detachment traite avant tout d’un homme avec un passif familial difficile qui est connecté à son travail, à ce qu’il essaie d’accomplir dans la vie, et en même temps qui se sent détaché des choses. » Avant que le caractère singulièrement éprouvant de sa tâche au quotidien ne vienne quelque peu modifier la donne…  » J’aime beaucoup les films centrés sur une seule personne, amenée à évoluer au fil du récit« , reconnaît un réalisateur à même de tirer le meilleur parti du cadre scolaire qu’il choisit d’investir pour nourrir une mise en scène particulièrement inventive.  » J’ai pensé que si quelques vrais professeurs venaient témoigner de leurs expériences dans le film, ça rendrait les personnages, et particulièrement celui joué par Adrien, plus réels. Il me semblait également intéressant d’y inclure des passages en animation, avec de la craie sur fond de tableau noir.  »

Et comme pour boucler la boucle des préoccupations éducationnelles du film, Tony Kaye a confié le rôle de la jeune étudiante mal dans sa peau à sa propre fille, Betty:  » C’était vraiment une bénédiction qu’il y ait un personnage dans le film que ma fille puisse jouer, ça m’a donné une opportunité de me rapprocher d’elle. Vous savez, j’ai été très égoïste, très autocentré dans mes jeunes années, et je n’ai pas toujours été un bon père… » l

NICOLAS CLÉMENT

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