Je m’enneige

Il sont deux frères jumeaux, le sang pollué par un mal entre sclérose et ataxie de Friedreich ( » et deux ou trois saloperies« ), qui pousse ponctuellement l’un à virer caoutchouc quand les crises de l’autre le pétrifient sur pied. Le père est mutique, ne raconte rien et ne s’explique jamais -il végète, crépusculaire. Le départ précipité de la mère en clinique, cinq ans plus tôt, a achevé de détruire le faible lien entre ces trois hommes, l’un ayant décidé de décamper à des kilomètres quand les deux autres cohabitent sans se croiser. Dans cette famille amorphe, les secrets forment légion, que nul ne semble pressé de déterrer, jusqu’à ce qu’un beau jour la très diminuée daronne se mette à répéter en boucle le même nom propre, celui d’une ville ou d’autre chose, qui n’évoque absolument rien à ses fistons d’interlocuteurs:  » Varsovie« . S’ensuit une quête d’une déroutante tendresse, menée par un narrateur déchiré entre ses élans de jeune homme et la sensation de n’être déjà au fond plus qu’un  » cadavre en sursis« . Sombre à plus d’un titre, débordant pourtant de sobre fantaisie, ce troisième roman de Benoît Sourty marque par sa très vive justesse, étonnamment desservie par des titres de chapitre d’une agaçante fadeur. L’ensemble est sensible comme rarement, séduisant sans cabotinage.

De Benoît Sourty, éditions Asphalte, 160 pages.

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