J’ai beau être matinal, j’ai mal

Lundi, c’est Zean-Marie. Porté par une inexpugnable envie d’arpenter les voiles nocturnes de la ville, notre chroniqueur Guillermo Guiz en sépare le bon grain de l’ivraie. « Night in, Night out », épisode 35.

Ca commence par un arbitrage. Où donc placer le curseur de la vulgarité dans une chronique qui se veut libre, égale et fraternelle? Certains mots, frappés bien malgré eux de l’estampille « vulgaires » ont-ils droit de cité par ici quand d’autres, protégés par l’immunité Robert de la bienséance, prennent leurs aises en totale légitimité? Je pense à génisse par exemple. A varice. A grossiste. Ou à cassoulet. Cassoulet, c’est du Canada Dry, ça a le goût de la vulgarité, l’odeur de la vulgarité, la consistance et la couleur de la vulgarité. Mais c’est un met. Alors que noircir une « bite » sur cette feuille électronique, sauf si Nino s’aventure vers les étendues océanes, m’attirera probablement les foudres de ma direction. Or not, vu que personne ne me lit plus haut dans la hiérarchie et que je pourrais fort bien te décrire, avec force détails, comment j’ai bibliquement aimé une louve dans les fourrés d’automne, en Birmanie, sans qu’une quelconque réaction me fouette les doigts à coups de matraques télescopiques. En clair, je peux te le dire comme je le pense, sans me brider, en version idiomatique, comme on le pensait au quartier avant que j’émigre vers de plus bourgeoises contrées: Brodinski, sérieux, il doit avoir mal à la bite.

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Munch, dans son grand allocentrisme, n’est pas le dernier à se l’être figuré. Bien décidé à rendre au journalisme d’enquête son honneur baffoué, j’ai voulu tendre le micro au garçon, afin qu’il m’éclaire lui-même sur cette vaste et décisive interrogation. Carnet-GSM en main, vodka en tête, je m’avance donc vers le plus canon des DJ’s du moment, beau-gosse ultime, serial-humidificateur, mais sa réputation me ferme rapidement les perspectives: en deux temps trois mouvements, Brodinski emmène une jolie plante dans les coulisses du Libertine Supersport, derrière le bar du bas. En répondant par l’absurde à la question ô combien cruciale que je me posais jusque-là, dimanche matin, vers 5h30. Le monde de la nuit, finalement, c’est très mathématique, c’est un monde d’équations. DJ + Bon + Beau = guest permanente à PtiteCulotte-City. Ce qui, pour revenir à mon questionnement originel, peut résolument causer des irritations de la sportivité.

Après, j’ignore si Brodinski est casé, s’il est fidèle ou s’il en croque. Peu importe finalement: vous ne me contredirez pas Jean-Paul, cela ne nous regarde pas. L’essentiel est ailleurs. Le petit prince de l’électro française (quel joli surnom, d’une originalité saisissante) venait en effet de retourner le K-Nal avec son tabassage bondissant et festif. Comme d’hab quand il pousse les disques à Bruxelles. Comme d’hab aussi, la tuerie se passait devant des hordes de nanas prêtes à lui offrir en pâture une vertu qu’elles avaient infime, en la circonstance. Mais cela ne nous regarde toujours pas. Tant mieux pour le K-Nal, cette soirée blindée. La niche de l’avenue du Port toussotait manifestement un peu ces dernières semaines. Comme la plupart des ses congénères: les soirées qui débordent se raréfient, les pros du milieu s’inquiètent un brin. « Le pire ennemi du clubbing à Bruxelles, c’est le beau temps. Et il y a trop d’offre en ce moment », me confia en fin de soirée Lorenzo Serra, l’un des patrons du Libertine. Faut voir. Trop d’offre en musique électronique? Peut-être. Les examens? Aussi. Le soleil? Ok. C’est aussi pour ça que la Strictly Niceness, à la Bodega, craque systématiquement les coutures: la belle trentaine de moyenne, le coup de rein tropical et le soleil dans le coeur. En bonus-track, l’époustouflant Organ Donor, entendu samedi à la Bodega. Cadeau.

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Le soleil, petit arnaqueur des steppes, a d’ailleurs fait sa prude toute la journée de samedi. Laissant au shaker alcool-testostérone-défilé-phéromones-danse-drogue l’entière responsabilité du réchauffement corporel pour une Gay Pride dont, en réalité, je n’ai palpé que les derniers atermoiements outdoor. A 23h, moment choisi pour débarquer en ville avec l’excellente Claire Gendrot, les beats avaient encore faim mais les noceurs, homos ou non, semblaient glisser complaisamment sur la pente du grand n’importe quoi. Devant des lascars interdits, en stand-by, comme à l’affut. Claire G… C’est marrant de grandir et de se retrouver en pleine orgie arc-en-ciel, clopin clopan, avec une nana qu’on kiffait des années plus tôt sur Radio 21. Celle qui, avec l’Ultra-Dobbs, créa les compils Soul Power, sources initiales de déflorages musicaux à la Bill Withers, O’Jays, Chaka Khan ou Minnie Riperton. C’est marrant aussi de tomber nez-à-seins avec Julie G., l’éternelle et indispensable Julie G., drapeau gay accroché au pantalon, allumée comme une bougie dans un stand piloté par DJ « Celebrity’s » Mike. Là, à deux ronds de poils, attroupement devant le Beurschouwburg: d’après mes infos, l’une des afters de la Gay Pride devait s’y tenir et, l’espace d’un instant, j’ai cru qu’une marée humaine tentait d’investir goulument les lieux. En fait non. C’était juste l’Eurovision sur écran géant.

Sandra, je te chantais, je te chante et je te chanterai. Bien avant Mélanie Laurent, Rosario Dawson, Penelope Cruz ou Natalie Portman, ma première romance cathodique s’abattit hardiment, du haut de mes cinq ans, sur l’impératrice de la fricadelle. S + G = coeur, encore une équation, et de Sandra à Georges Michael, conviens-en, il n’y a qu’un jet de laque. Ca tombe plutôt pas mal. « J’aime bien les anchois et le Nutella. Mais pas dans le même sandwich », me déclina jeudi soir, en plein Bar du Marché, Vito De Luca, à propos d’une reprise de New Order par Georges Michael. L’unique membre (et donc fort logiquement leader) d’Aeroplane goûtait, pour l’une des premières fois, aux affres de la sortie en terres bruxelloises. Du moins de ce côté-là du dj-booth, l’espace VIP, very incognito people. Plutôt sympa le mec, on est de la même génération: improvisé Hitch pour mon avenir horizontal, Vito m’a convaincu d’appuyer les sms et, surtout, d’enlever les smileys, ces « tue-la-drague »… Bien vu. Me suis laissé entraîner dans un traditionnel Délecta + Bar du Marché + Wood = déchirage, jeudi soir, en compagnie de Super-Dobbs et, au final, d’une solitude un peu pathos. Mais le Standard peut encore être champion, c’est déjà ça de gagné sur l’ennemi.

Vendredi, pareil en fait. Marquee (pour l’after du Brussels Tour de Das Pop) + Tigre + Wood = heureusement que la nouvelle génération, celles des nanas intrépides de 18 piges, m’a sorti d’une torpeur fort peu urbaine. J’ignore si elles veulent se venger des déceptions infligées à leurs mères, mais la nouvelle génération de post-ados me laisse perplexe. Waw, Nino qui rentre dans le sociétal, ça rigole plus. Mais avoue, elles boivent, fument, baisent en random, s’en foutent des mecs, s’en moquent, se la racontent, tapent des délires, la jouent garçonnes, complètement garçonnes, finissent les hommes au sarcasme et moi, tendre comme un gigot d’agneau, ça me fait bizarre. Je ne sais pas trop quoi penser de ces nouvelles castratrices, qui ont probablement bien raison d’investir l’espace laissé béant (et c’est heureux) par les garçons. Mais bon, il est quand même mystique d’aller chercher deux ptites gonzesses à 3h du mat’ et de se faire brinqueballer comme un bleu dans les rues de la ville. Heureusement que j’avais la Ploucomobile en renfort: à un moment comme ça, j’ai tapé une pointe à 120, tu vois, avec le Sweat de Snoop-Guetta à fond dans les sub-woofers et tout, et j’ai tapé un frein à main comme ça, sur un parking et tout, pour montrer c’était qui le chef ici et je les ai calmées les petites, comme quoi, faut juste être un mâle, comme avant, et tout rentre dans l’ordre. Tu cherches l’ambiance ou l’ambulance? Rideau.

Guillermo Guiz

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