Into the Wild

Signe des temps, les productions littéraires et bédéphiles abordent de plus en plus l’avenir incertain de l’humanité. Femme sauvage s’engouffre dans la brèche.

Depuis son apparition dans la culture underground au milieu des années 60, la bande dessinée de science-fiction a toujours raconté des histoires de survivants évoluant dans un monde post-apocalyptique: Richard Corben et ses histoires sordides, Auclair et Simon du Fleuve, Paul Gillon et sa bien nommée La Survivante. Le vrai changement tient dans l’apparition de ce thème dans la BD mainstream. Certains prophètes littéraires annonçaient l’intérêt grandissant du public pour ce sous-genre, et c’est le contraire qui s’est produit: la littérature dite blanche s’est emparée du thème. Tom Tirabosco succombe à son tour aux arguments des prédicateurs de mauvaises nouvelles.

Loin des villes

Nous sommes dans cette période d’entre-deux, où tout ne s’était pas encore effondré, celle que le premier Mad Max avait si bien rendue. Dans un avenir pas si éloigné, suite à des affrontements de plus en plus violents avec une population exsangue, le gouvernement des États-Unis décrète l’état d’urgence. Les « Rebels », un mouvement de résistance, ont fui vers le Canada. L’histoire débute avec le départ d’une jeune femme décidée à les rejoindre dans le nord. Dans un monologue, elle s’adresse à une personne absente, un petit ami mort dans une des dernières manifestations et qui l’avait mise en garde à maintes reprises sur les dérives de la société. Elle, comme bien d’autres, n’y avait pas cru;  » Le capitalisme, ça fait maintenant pas mal de temps qu’il a pris le contrôle de nos têtes« , pense-t-elle. Endormi par les écrans, le peuple a laissé les psychopathes prendre la Maison-Blanche, précipitant l’effondrement général. Et la voilà partie sur les chemins de montagne, creusant toujours plus l’écart la séparant du chaos. Si les villes sont devenues trop dangereuses, il va également falloir survivre en montagne. Les pièges de la nature n’effraient pas notre héroïne. Un ancien petit ami de sa mère lui avait enseigné l’art de survivre en milieu hostile: comment pêcher, construire un feu, ne jamais enlever ses chaussures… Mais le danger vient également des humains, chasseurs de gibier ou de chair fraîche.

Into the Wild

Tom Tirabosco nous aménage quelques surprises, induisant à chaque fois de nouvelles directions au récit. Notamment une rencontre que la jeune femme va faire, apportant au titre de l’album toute sa signification… L’auteur italien, établi depuis 1970 à Genève, n’a qu’à lever le nez pour s’inspirer du décor montagnard dans lequel s’inscrit sa nouvelle BD. Par contre, le choix des USA comme point de départ d’une guerre civile et des dérèglements climatiques est un message clair au puissant peroxydé qui le dirige. S’inscrivant dans la lignée des récits survivalistes, Femme sauvage bénéficie du traitement charbonneux du crayon gras propre à l’auteur, préparant le lecteur à la nuit apocalyptique qu’il nous prédit.

Femme sauvage

De Tom Tirabosco, éditions Futuropolis. 240 pages.

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