Critique

Les Barons

Le film de Nabil Ben Yadir a su trouver, chose rare pour un film produit en Belgique francophone, le chemin du public qui est venu nombreux voir cette comédie fort drôle et socialement significative.

Le film de Nabil Ben Yadir a su trouver, chose rare pour un film produit en Belgique francophone, le chemin du public qui est venu nombreux voir cette comédie fort drôle et socialement significative. Autodidacte inspiré par une réalité vécue, Ben Yadir y prend pour personnages principaux 3 amis bruxellois issus de l’immigration maghrébine: Hassan, Aziz et Mounir. A Molenbeek, où ils habitent, la rue est leur royaume. Mais ils y mesurent leurs pas. Car dans leur vision de l’existence, ces derniers sont comptés. Chaque être humain naîtrait en effet avec une quantité de pas potentiels limitée, la mort venant quand ils ont épuisé cette précieuse provision. Pas question donc, pour ceux qui s’appellent entre eux « les barons », de trop en faire. De travailler, par exemple… Hormis les visites au bureau de chômage, le trio passe le plus clair de son temps affalé sur l’étal d’une épicerie du quartier, ou autour de la BMW qu’ils possèdent en « collectif » avec quelques autres jeunes. Quand Hassan, qui rêve de devenir humoriste, se résout à faire ses premières armes sur scène, qui plus est en y transposant ce qu’il vit et observe au quotidien, la réaction des autres « barons », et de sa famille (son père travaille à la STIB et aimerait bien l’y faire engager), ne sera pas forcément positive… Si des événements dramatiques surviennent dans son film, Ben Yadir les aborde le plus souvent par le biais du comique. Et il le fait avec une efficacité certaine. A l’italienne, somme toute, et ses « héros » font un peu penser aux Vitelloni de Fellini. Pour autant, ils s’inscrivent dans la réalité d’un Bruxelles en pleine transformation, où la communauté maghrébine n’avait jamais été placée ainsi au centre d’un film. Et si l’on rit, beaucoup même, on y remarque aussi une pertinence du regard posé sur de vraies questions sociales, la tentation du repli, les rapports entre hommes et femmes, entre tradition, religion et modernité, entre logique communautaire et envol individuel. La comédie peut en dire beaucoup, en plus de divertir! Les Barons nous en apporte une nouvelle preuve, au fil d’une verve humoristique que relaient idéalement de jeunes acteurs bien choisis.

Louis Danvers

LES BARONS, COMÉDIE DE NABIL BEN YADIR. AVEC NADER BOUSSANDEL, MOURADE ZEGUENDI, JAN DECLEIR. 2008. ****

Ce lundi 12 septembre à 20h20 sur La Une.

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