Critique

[À la télé ce soir] Lucky Luke: la fabrication du western européen

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Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Pour fêter son 70e anniversaire, Guillaume Podrovnik part avec humour, originalité et panache sur les traces du lonesome cowboy.

Il est né en 1946 dans un hors-série du journal Spirou, porte le drapeau belge sur sa tenue de cowboy (veston noir, chemise jaune et foulard rouge), a été interprété au cinéma par Jean Dujardin et parcourt l’Ouest américain sur un cheval qui parle et joue de l’harmonica. Inventé par Maurice de Bevere (tu pousses le bouchon un peu loin Morris), fils courtraisien d’un fabricant de pipes, Lucky Luke est l’un des personnages les plus mystérieux de l’Histoire de la BD. Un justicier aux éperons d’or dont on ne sait finalement pas grand-chose si ce n’est qu’il tire plus vite que son ombre… Pour fêter son 70e anniversaire et la sortie de La Terre promise, un nouvel album écrit par Jul et dessiné par Achdé, Guillaume Podrovnik part avec humour, originalité et panache sur les traces du lonesome cowboy, de son chien demeuré (Rantanplan démystifie Rintintin) et de ses ennemis écervelés, les frères Dalton… Depuis l’enfance dans les mornes plaines agricoles flandriennes de Maurice de Bevere, gamin fasciné par les premiers dessins animés américains qui comprend comment fonctionne l’animation grâce à un projecteur Pathé-Baby, jusqu’à l’exploitation de son personnage sans passé ni états d’âme sur tous les supports imaginables.

Historien de la BD, commissaire d’expo et repreneurs (à commencer par Jul, son actuel scénariste) se succèdent pour tirer un portrait à 360 degrés de l’adroit justicier. Parce que raconter Lucky Luke, qui ressemblait dans un premier temps à un ersatz de Popeye, c’est un peu raconter l’Histoire d’une certaine vision, européenne, du Far West et de l’Amérique. Et ça ne peut se faire sans une plongée dans l’univers du western. À travers de délicieuses images d’archives, Morris raconte les versions expurgées en France mais aussi en Belgique et dévoile sa formidable complicité avec Goscinny (rencontré à New York et avec qui il aimait mater des films de Joë Hamman en buvant du whisky)… Ce même Goscinny à qui il interdisait les jeux de mots, dont il avait horreur, le menant sur la voie d’un délectable comique de situation. Les influences américaines mais aussi catholiques flamandes, les clins d’oeil au cinéma et à l’Histoire des États-Unis, la place riquiqui et contestable concédée aux femmes et aux Chinois ou encore le passage de la clope à la brindille… Tagada, tagada, voilà les Dalton.

DOCUMENTAIRE DE GUILLAUME PODROVNIK. ****

Ce dimanche 18 décembre à 17h35 sur Arte.

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