Critique

[À la télé ce soir] Broken Land

Dans un champ de tir près de la frontière entre le Mexique et les États-Unis. © Luc Peter
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Stéphanie Barbey et Luc Peter tendent le micro à divers Américains d’Arizona pour raconter un quotidien aux sentiments qui s’entremêlent dans un pays certes toujours plus refermé sur lui-même.

Dans le désert, des buggies au-dessus desquels flotte le drapeau américain glissent sur les dunes à la recherche de clandestins. Dans le sol, des chaussures, des vêtements, des sacs à dos et des petits jouets se fossilisent. Ultimes témoignages de ceux qui y sont passés, parfois dans le sens le plus cruel du terme. On est aux Etats-Unis. Au pied de l’immense barrière de 1300 kilomètres léguée par George W. Bush pour freiner l’immigration clandestine venue du Mexique. Tandis que des gardes-frontières expliquent leurs techniques de travail et la mort de collègues abattus par des narcotrafiquants, des habitants dissertent sur l’odeur des immigrés. Ces frontaliers ont parfois transformé leur habitation en camps retranchés avec caméras et barbelés. Dorment avec des armes chargées aux balles perforantes sur leurs tables de nuit. « Ce n’est pas de la paranoïa, c’est un style de vie », disent-ils, eux qui sont en ligne directe avec tout ce que la région compte d’autorités. D’autres, davantage empreints de compassion, vont en aide aux immigrés en leur apportant des vivres et en déposant des bouteilles d’eau sur leur route. Déplorant l’époque où ils s’entraidaient et faisaient la fête avec les Mexicains. « Dans l’Histoire, chaque fois que l’homme a dessiné une ligne et a dit: « ça c’est mon côté, ça c’est ton côté » et a donc tracé une séparation imaginaire appelée frontière, il y a eu des problèmes. Ça en pose encore aujourd’hui », note l’une de ces habitantes aux réflexions moins sécuritaires. Sans y ajouter de commentaire et sans chercher à démontrer quoi que ce soit, Stéphanie Barbey et Luc Peter tendent le micro à divers Américains d’Arizona pour raconter un quotidien aux sentiments qui s’entremêlent dans un pays certes toujours plus refermé sur lui-même mais où des gens ne peuvent s’imaginer en 2016 vivre en ayant peur de leur voisin. Un documentaire plus universel qu’il n’y paraît.

DOCUMENTAIRE DE STÉPHANIE BARBEY ET LUC PETER.

Ce lundi 4 avril à 00h15 sur Arte.

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