Critique

[à la télé ce soir] Il était une fois en Irak

© KEO FILMS LTD 2020
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Négation de toute humanité, motifs de guerre fallacieux et instrumentalisation des religions… Un documentaire nécessaire.

« Nous avons semé les graines de Daesh en 2003. » « J’aimerais pouvoir dire que l’Irak n’a rien à voir avec le 11 septembre mais c’est faux. » « On n’en aura jamais fini. Tout le monde veut notre mort. À côté de Daesh, les gens d’Al-Qaïda avaient l’air de petits rigolos. Et c’était la réalité. » « Un jour normal avec Daesh, ça lapidait des femmes dans la rue, ça coupait des mains, ça tuait des gens… » Ces phrases sont glaçantes. Les images encore davantage. Mais que s’est-il vraiment passé en Irak ces 20 dernières années? Et comment ce qui s’y est déroulé a changé la face du monde? Le pays de Saddam Hussein a fait couler beaucoup de salive et d’encre, a été largement commenté par les hommes politiques et les médias. Le documentaire britannique en trois parties de James Bluemel prend l’histoire par un autre bout de la lorgnette. Ce sont des civils qui y ont vécu sous les bombes, des journalistes et photographes de terrain qui y ont bravé le danger, et des militaires des deux camps qui retracent ici la guerre d’Irak. Depuis l’invasion par les troupes de la coalition occidentale en 2003 jusqu’au chaos qui prévaut encore aujourd’hui.

Il y a Waleed, un fou de l’Occident, qui était à l’époque dans la seule formation de heavy metal irakienne. Omar, qui a perdu son boulot de prof d’Histoire à l’université quand Daesh est arrivé à Mossoul, a mis le système éducatif au service de la parole d’Allah et des nouveaux combattants musulmans, obligeant les profs à réécrire les manuels scolaires. On croise aussi le lieutenant colonel Nate Sassaman, un militaire américain qui voulait vraiment pacifier le coin, ou encore le vendeur de voitures Samir al-Jassim, volontaire irakien réfugié aux États-Unis qui faisait partie des soldats ayant débusqué Saddam.

Circonstancié, passionnant, Il était une fois en Irak décortique les prémices de l’attaque et l’invasion éclair (Bagdad était l’une des villes les plus tolérantes et cosmopolites de la région). Un pays anéanti et livré à lui-même. Les islamistes radicaux qui affluent de l’étranger et s’organisent pour fonder Al-Qaïda. La guerre civile et l’arrivée de l’État islamique alors que l’armée a disparu et que les soldats se sont volatilisés. Négation de toute humanité, motifs de guerre fallacieux et instrumentalisation des religions… « J’espère que vous arriverez à ce que vous voulez. Je suis heureuse de pouvoir faire entendre ma voix. C’est important pour moi. À quoi bon dire qu’on est persécuté si personne ne nous entend« , entame une femme âgée anonyme. Un documentaire nécessaire.

Documentaire en trois parties de James Bluemel. ****

Mardi 30/03, 20h50, Arte.

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