Critique

Dans la peau de Vladimir Poutine

Karl Zero et son épouse Daisy D’Errata se plongent dans la personnalité mystérieuse de Vladimir Poutine. Un film caustique et informé.

DANS LA PEAU DE VLADIMIR POUTINE, DOCUMENTAIRE DE KARL ZERO ET DAISY D’ERRATA. ***

Ce mardi 28 février à 22h10 sur Arte.

Scotché par les éléments d’une vie bien pleine découpée en moments forts et en anecdotes frémissantes, on s’interroge néanmoins: le procédé est-il véritablement et en tous points honnête? Pas que la personnalité de Vladimir Poutine, qui s’apprête à réinvestir le Kremlin pour un nouveau tour de carrousel, soit la moins inquiétante du monde. Mais Karl Zero et son épouse Daisy D’Errata font partie de ces journalistes-humoristes dont on a tendance, vu leurs exploits passés, à interroger les méthodes. Qu’on se le dise: le travail d’enquête y est. Aucun doute. Simplement, la forme caustique et univoque appelle le doute -ce qui, finalement, est plutôt une bonne chose.

Après Jacques Chirac et Fidel Castro, ce nouveau Dans la peau de… s’attaque au plus mystérieux des chefs d’Etat contemporains. Un homme qui n’a aucun mal à brandir sa poigne de fer comme argument de vente et de persuasion. Décliné à la première personne, avec une voix off permanente et un peu bidon (c’était le cas pour l’opus consacré à Fidel Castro), le film se regarde comme une introspection construite au présent, mais piquée de nombreux flashbacks. Sur un ton incisif, moqueur, cynique, Karl et Daisy tentent de démontrer comment Poutine est parvenu à grimper si haut dans les cimes du pouvoir, sans concession et à coups d’archives frappantes, de l’ancienne Union soviétique à ses rapports avec sa « marionnette » Dmitri Medvedev, en passant par ses glaçantes interventions télévisées, la Tchétchénie, etc. Quand, au moment de la triste affaire du Koursk, un journaliste occidental lui demande, plein de fausse naïveté: « Que s’est-il passé avec le sous-marin? », le futur (re)président répond, aussi goguenard que terrifiant de froideur: « Il a coulé. » Dans la peau de Vladimir Poutine mérite amplement sa vision. Même si le procédé peut prêter à discussion. Même si l’humour grinçant (pas toujours des plus fins d’ailleurs) et la carte de visite de ses auteurs nous incitent à la prudence. Même si, en sortant de là, on n’a ni envie d’être russe, ni envie de croiser l’ami Poutine en rue.

Guy Verstraeten

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