Critique

Four Lions

© DR

A Sheffield, quatre aspirants kamikazes cherchent à frapper un grand coup au nom du Jihad. Sans trop savoir, toutefois, comment s’y prendre.

Il s’était fait remarquer à l’aube des années 2000 sur les petits écrans britanniques avec une série radicale, Jam, malmenant des sujets aussi sensibles que le viol, l’inceste ou la pédophilie à grands coups d’humour noir. Le satiriste Chris Morris nous revient avec Four Lions, un premier film qui aurait pu tout aussi bien s’appeler Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le Jihad sans jamais oser le demander, et est en quelque sorte au terrorisme ambiant ce que le Dr Strangelove de Kubrick a pu être à la guerre froide en son temps, toutes proportions gardées il va sans dire.

Il y a là Omar, Waj, Faisal et Barry, bientôt rejoints dans leur « lutte » par Hassan. Soit quatre aspirants terroristes essentiellement mus par leur irrépressible désir de faire péter quelque chose. Ce vers quoi ils s’évertuent à tendre, en tâtonnant toutefois, un quelconque mode d’emploi leur faisant cruellement défaut.

S’ils se promettent ainsi de dynamiter, au sens propre, les fondements de l’impérialisme occidental, les Disneyland, McDonald’s et consorts, les loustics n’en nourrissent pas moins une réelle passion pour les jeux vidéo ultra-violents, les parcs d’attraction et les iPhones, et tiennent pour référents culturels James Bond, Rambo, Tupac ou autres Tortues Ninja. Simba, le Roi Lion, pur produit de l’usine à rêve Disney s’il en est, faisant même figure à leurs yeux de véritable modèle, son combat contre le fourbe Scar les renvoyant à leur propre lutte contre le spectre consumériste. Des paradoxes « énoooormes », à l’image d’un film qui n’a pas peur de verser dans la surenchère, mais que personne ne prendra même la peine de relever au sein de ce petit monde où la bêtise le dispute, il est vrai, à l’ignorance.

Cocktail détonant

Quoi qu’il en soit, de rois de la jungle à rois du gag il n’y a, semble-t-il, qu’un pas, que ces bras cassés du Jihad, ces empotés de l’explosif, ces ânes bâtés de la cause islamiste, franchissent allègrement. La tête baissée et les (fausses) certitudes chevillées au corps, encore bien. Pour un film nettement plus à l’aise sur le terrain de la comédie pure, hilarante, en l’occurrence, que sur celui de l’émotion (un final qui tombe un peu à plat) ou de la charge politique, peu poussée il est vrai (chacun en prend pour son grade, des islamistes radicaux aux gardiens de la paix britons, tous plus idiots les uns que les autres).

Légèrement inégal, un chouia systématique dans ses gags teintés de lose attitude, Four Lions n’en compte pas moins son lot, véritablement impressionnant, de séquences d’anthologie appelées à devenir cultes, composant une farce largement aussi réjouissante qu’impertinente où se mêlent humour grinçant et esprit potache. Allah akbar!

Four Lions, comédie de Chris Morris, avec Riz Ahmed, Kayvan Novak, Nigel Lindsay. 1h34.

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Nicolas Clément

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