Exposition: L’Invitation au voyage selon Bill Viola

Ascension, 2000 © Photo Kira Perov
Trân Thi-Tiên
Trân Thi-Tiên Stagiaire

Si L’Invitation au voyage de Baudelaire sonne comme un conte merveilleux où « tout n’est qu’ordre et beauté/luxe calme et volupté », celle imaginée par Bill Viola -au Grand Palais à Paris jusque fin juillet- en prend le parfait contrepied…

Depuis le mois de mars, le Grand Palais accueille une exposition inédite sur l’art vidéo, consacrant une rétrospective à l’artiste américain Bill Viola, pionnier dans cette discipline. Ses oeuvres, principalement composées d’installations vidéos et sonores, sont conçues comme des « poèmes visuels » s’adressant aussi bien à notre vue qu’au reste de nos sens. L’exposition est en effet pensée comme une expérience totale. La scénographie est subtilement adaptée aux lieux afin d’offrir au visiteur une immersion complète dans un monde intérieur. Plongé dans le noir des salles obscures, il ne reverra la lumière du jour qu’à la sortie de l’exposition.

Du spirituel dans l’art

Les commissaires de l’exposition, Kira Perov et Jérôme Neutres ont conçu celle-ci comme une invitation au voyage. Un voyage « initiatique, sensoriel et intime » loin du pays idéal dépeint par Baudelaire dans son poème puisque le monde dans lequel Bill Viola nous emmène est un univers aussi mystérieux que mystique, aussi intrigant que déroutant. Les images projetées évoquent tantôt des souvenirs qui peu à peu se décantent en songes (The Veiling, 1995), tantôt des apparitions situées entre rêve et réalité hallucinée virant parfois au cauchemar (The Sleep of Reason, 1988). L’exposition exalte moins le quotidien qu’il ne le transcende. En outre, les références bibliques se multiplient, s’intègrent au quotidien (Going Fourth by Day, 2002; Ascension, 2000; The Quintet of the Astonished, 2000), conférant aux oeuvres une dimension intemporelle, proche du mythe où le feu, l’eau et la lumière hantent les images.

Fire Woman, 2005 - Tristan's Ascension, 2005 - Going Fourth by Day (detail),
Fire Woman, 2005 – Tristan’s Ascension, 2005 – Going Fourth by Day (detail), « First Light », 2002© Photo Kira Perov

Alors, le parcours de l’exposition se transforme peu à peu en un voyage métaphysique où l’on en oublierait presque la notion du temps. Temps que Bill Viola se plaît à étirer, distordre, dilater, de telle sorte que l’attente devient une part constitutive de l’oeuvre. La lenteur extrême de certaines vidéos peuvent déconcerter, d’autant plus lorsqu’un événement inattendu vient subitement briser la longue attente. Mais au bout du compte, c’est au visiteur de donner la mesure du voyage, s’arrêtant sur une oeuvre, passant une autre, prenant quelquefois le temps de déconstruire, recomposer, imaginer et puis, réfléchir aux trois grandes questions métaphysiques posées par l’artiste américain: Qui suis-je? Où suis-je? Où vais-je? Des interrogations qui finalement posent avec une extrême clairvoyance la question de la condition humaine, mais avec l’approche nouvelle et différente de Bill Viola.

Ainsi, l’esthétique recherchée par l’artiste américain s’opère moins au niveau de l’oeuvre même qu’au niveau de l’expérience qu’elle suscite, Bill Viola voulant préserver le choc esthétique résultant de la rencontre du visiteur avec l’oeuvre d’art.

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