Critique | Musique

MF Doom – Operation Doomsday

RAP | Doom réédite, dans une mallette métallique, un premier album hallucinant truffé de samples de films et de cartoons. Attention classique.

« Came to destroy rap. » D’entrée de jeu ou presque, MF Doom met carte sur table et annonce la couleur. Il entend bien détruire le hip hop. Ou du moins l’idée qu’à l’époque (le disque date de 1999) certains ont fini par s’en faire. Il y a du Scooby-Doo et des Quatre Fantastiques sur le premier album du rappeur au masque doré et aux productions toujours très inventives. Avec Doom, le rap aime le saxophone, la flûte, les instrus parsemées de cuivres. Les ambiances soul, les bandes-son et autres dialogues de cartoons…

Operation Doomsday, c’est quelque part la revanche de Daniel Dumile sur l’industrie du disque. Né à Londres de parents aux origines plus exotiques, Dumile grandit à Long Island et se fait connaître sous le pseudo de Zev Luv X au sein de KMD. Kausing Much Damage (rebaptisé plus tard Kause in a much damaged society afin de se donner une allure plus pacifique) dévoile son premier album, Mr Hood, majoritairement autoproduit, en 1991. MTV embraie. Diffuse les clips. Quand 2 ans plus tard, le frère de Daniel, DJ Subroc, qui crée à base de samples l’univers de leur projet, meurt envolé par une voiture en tentant de traverser une autoroute. Peu délicat, Elektra coupe les ponts la semaine qui suit et refuse de sortir leur 2e album, Black Bastards, à cause d’une pochette jugée trop choquante. Le dessin cartoonesque d’un petit noir pendu.

Traversée du désert dans cette jungle qu’est l’industrie du disque et cette vie qui ne lui fait pas de cadeau. Daniel sombre dans la dépression. Il disparaît pendant 3 ans. Vit dans la misère comme un SDF. Dort sur les bancs. Et erre dans les rues de Manhattan.

Madlib et Thom Yorke

Daniel touche le (bas-) fond mais c’est pour mieux remonter à la surface. Le binoclard prend ses cliques et ses claques et s’installe à Atlanta où il se réinvente. Alors que Black Bastards voit enfin le jour, tel un Clark Kent du hip hop, Dumile se métamorphose en MF Doom. MF Doom (pour les novices, MF signifie Metal Face), c’est l’ennemi juré des Quatre Fantastiques. Un célèbre super-vilain des comics Marvel. Zev Luv se planque derrière son masque de fer, refuse de se présenter sans et laisse un temps planer le doute sur son identité. Le bois dont on chauffe les légendes…

Aujourd’hui, grand adepte du partenariat de luxe, le bonhomme, qui a notamment collaboré avec Gorillaz, a pas mal de trucs sur le feu. Il doit notamment terminer le deuxième Madvillain avec Madlib et mijote un coup avec Thom Yorke. Si le leader de Radiohead avait déjà remixé un morceau de Doom, Gazillion Ear, disponible en bonus sur l’album Born Like This, Dumile annonçait récemment bosser sur quelques titres avec l’Anglais. « On va probablement finir par enregistrer un album », prédit-il. En attendant, on se repasse Operation Doomsday ou on s’écoute versions originales et instrumentales du CD bonus en feuilletant le livret de 32 pages qui va avec et en regardant la boîte à tartines métallique qui trône sur la cheminée. Doom… the right thing.

Julien Broquet

MF Doom, Operation Doomsday , distribué par Stones Throw. ****

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content