Le football, première religion d’Afrique

Le Botanique lance ce 10 juin deux expositions photo autour de l’Afrique. Deux portraits radicalement opposés du continent, mais terriblement personnels et impliqués. Focus sur « Amen », de Jessica Hilltout.

Jessica Hilltout, Amen, du 10 juin au 18 juillet 2010, Galerie (Botanique, Bruxelles)
www.jessicahilltout.com

Avec son « Amen », la belgo-britannique expose toute la passion du football des africains, presque une seconde religion. « Avec cette Coupe du Monde qui se passe sur le continent le plus passionné de foot, pourquoi est-ce qu’on ne montrerait pas tout ce qui se passe dans l’ombre de cet énorme événement? », s’est interrogée la photographe avec son père, passionné d’Afrique tout comme elle.

Jessica Hilltout: Je ne suis pas grande fan de foot, mais j’adore l’Afrique et j’avais déjà, dans mes voyages précédents, photographié des balles faites à la main, etc. Je me suis dit « pourquoi ne pas mettre mon regard là-dessus? » Ce n’est pas vraiment du reportage, mais pour moi, à travers le foot, c’est aussi un message positif pour l’humanité. On ne peut jamais dire que toute l’Afrique est comme ça. Il n’y a pas que de la souffrance là-bas, il y a aussi plein de bonnes choses et j’avais envie de concentrer mes énergies là-dessus.

Par rapport à l’exposition de Cédric Gerbehaye, il y a un vrai contraste…
J.H.: Tout à fait, mais c’est ça que j’avais voulu montrer. C’est ça, la photographie: tu partages avec les gens une façon de voir le monde. Je pense qu’il y a une énergie sur le continent africain qui est propre à eux, à cause des conditions difficiles qu’ils vivent. Mais ils arrivent à faire tellement avec si peu, malgré la souffrance et la difficulté d’avancer dans le quotidien. Ils ont une vraie une dignité, une fierté, une solidarité et une certaine croyance.

Tu as ramené toute une collection de balles faites main, tu n’as pas honte de leur avoir confisqué?
J.H.: Non, jamais de la vie! Je leur ai ramené des ballons de super qualité en échange, et ils étaient naturellement très contents. J’ai donné environ 100 ballons sur tout mon voyage mais ce n’est qu’une goute dans l’océan par rapport à ce que j’aimerais bien donner. Le but de cette collection, c’est que ce serait génial de l’échanger à une grande marque de sport pour pouvoir mieux aider les clubs avec lesquels j’ai travaillé. Ces ballons, c’est le symbole de la passion du foot, il n’y a pas mieux. Chacune est un bijou unique. J’avais ce petit rêve de rapporter des choses aux gens et ce rêve a grandi. Parce que ce sont des êtres merveilleux qui devraient être reconnus pour le travail qu’ils sont en train de faire. Le foot, ce sont des liens qui lient la société, les villages, je crois que les gens ne se rendent pas compte de ce qui se passe tous les jours sur ce continent et à quel point le foot est bon.

Sur place, comment se passe ta relation avec tes sujets?
J.H.: Dans mon projet, je ne suis pas reporter, j’ai besoin d’établir la confiance des gens, il me faut parfois 3-4 jours avant de sortir mon appareil, le plus important c’est que les gens comprennent mon message et qu’après, ils en fassent partie. Si je photographie des chaussures, c’est eux qui doivent me les amener, et d’une manière fière, qu’ils veulent participer.

C’est quelque chose qui ressort très fort de tes photos, la fierté. J.H.: Oui, et c’est vrai que pour les photos de pieds, une fois que les gens avaient compris que je passais une demie heure à photographier des pieds, ils courraient dans leur hutte et revenaient m’en montrer: « Jessica, j’ai trouvé une paire de chaussures, regarde, il y a Etoo marqué dessus. » Le plus important, c’était de quitter les villages avec une sensation de bien-être en eux et moi. Je trouve qu’on vit dans un monde qui est déjà assez difficile. Dans un certain sens, je m’accroche au message positif et à l’espoir, c’est ce qui m’aide à continuer. Il faut s’accrocher aux choses qui sont bonnes. Mais il faut aussi dénoncer, comme ce que Cédric fait magnifiquement dans ses photos. Il faut une combinaison de tous les regards d’artistes.

Kevin Dochain (stg)

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