Critique | Livres

Holly Goddard Jones – Une fille bien

Marie-Danielle Racourt
Marie-Danielle Racourt Journaliste livres

NOUVELLES | Holly Goddard Jones a réussi à faire tenir dans ses huit nouvelles toute la population de Roma, Kentucky, petite ville sans attrait où l’ennui est roi.

Holly Goddard Jones - Une fille bien

Dans cette bourgade insignifiante, « les adolescents devaient inventer de fausses rivalités juste pour avoir quelque chose à faire ». Les adultes aussi cherchent à tout prix à se désennuyer: des couples se forment pour mieux se déformer, les jeunes filles se retrouvent enceintes à un âge où d’autres ont des projets d’études, les garçons se saoulent pour jouer aux cowboys. Les voitures « ronnyfiées » ont la cote pour emmener les belles dans des bars interlopes. Pourtant, on sent une certaine compassion pour un père veuf qui choisit de rester auprès de son dégénéré de fils âgé de 20 ans au détriment d’une vie qui aurait pu être plus épanouie avec « une femme bien »; une mère dont la « fille bien » a été violée et assassinée par deux étudiants ivres et camés, et qui choisit de se réfugier dans une solitude profonde; ou encore ce personnage ambigu du jeune homme brimé par les normes sociales et familiales alors qu’il sent poindre en lui un amour homosexuel. Dans cette ville, « il y avait des choses dont il fallait se détourner, sur lesquelles il fallait fermer les yeux » si l’on voulait s’en sortir. Portrait intéressant d’une Amérique qui fout le camp dans lequel le lecteur veut s’immiscer pour sauver quelques paumés avant qu’ils n’empruntent le chemin du non-retour.

DE HOLLY GODDARD JONES, ÉDITIONS ALBIN MICHEL, TRADUIT DE L’AMÉRICAIN, 400 PAGES.

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