Du sang sur la toile

Une jeune femme étranglée. Un père de famille lardé de 24 coups de couteaux. Et une équipe de flics chargée de résoudre ce double meurtre délicat -le père tranquille en question s’était en fait inventé une nouvelle famille, virtuelle, sur le Net.

De Miyabe Miyuki, Éditions Philippe Picquier, Traduit du japonais, 236 pages.

On imagine sans peine ce qu’un auteur anglais, américain, norvégien, sud-africain ou même belge aurait pu tirer d’une telle trame: du bruit, de la fureur, un peu d’action et beaucoup de prises de tête de flics. Mais nous sommes ici, principal intérêt de ce roman qui n’en a pas beaucoup, dans un polar japonais, où rien ne se passe comme ailleurs.

Ici, chez une des stars nipponnes du genre, tout est feutré, posé, réfléchi et très discipliné -« Takegami et Chikako inclinèrent la tête dans une même requête. Ils avaient beau avoir reçu l’aval du commandant des opérations, il était pour eux hors de question de passer outre l’avis du commissaire Tachikawa au risque de le vexer et de créer une source de discorde durable. »

L’essentiel de son roman se déroulera donc dans une salle d’interrogatoire propre et bien rangée, avec des flics polis, mais pas moins malins qu’ailleurs, dans un long face-à-face entre des suspects et des flics qui n’en ont pas l’apparence -les suspects sont des écolières en socquettes et des vieilles filles tranquilles, les flics sont des gratte-papiers pressés de retourner à leur boulot administratif.

Curieux donc, plus que l’intrigue en elle-même qui a pris un méchant coup de vieux avant même d’être éditée en français. Traduit aujourd’hui mais écrit il y a 10 ans au Japon, ce roman policier décortique en effet les moeurs d’une Toile qui ne connaissait pas encore Facebook ou Twitter. Autant dire un fossile.

O.V.V.

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