Que reste-t-il des 250 cinémas de quartier de Bruxelles? (carte)

La Place de Brouckère en 1946. Les enseignes des nombreux théâtres et cinémas sont visibles sur la droite de l'image. © BELGA
Stagiaire Le Vif

À l’occasion de la Nuit Blanche de Bruxelles consacrée cette année au 7e art, Focus vous propose de replonger dans l’âge d’or du cinéma grâce à une visite guidée sur les traces des anciennes salles de quartier bruxelloises.

« C’était au temps où Bruxelles rêvait, c’était au temps du cinéma muet« , chantait Jacques Brel.

Les années 20. L’âge d’or des salles de cinéma. Rien qu’à Bruxelles, on en a compté jusqu’à 250 de 1895 à 1993. La rue Neuve en a même accueilli jusqu’à 20 simultanément, explique l’historienne du cinéma Isabel Biver, qui propose deux visites guidées gratuites durant la prochaine Nuit Blanche de Bruxelles. Les années 20, c’est aussi le moment où une typologie architecturale propre au cinéma se développe. Jusque-là, les cinémas investissaient des lieux déjà existants, des théâtres le plus souvent. À Bruxelles, le premier cinéma bâti ex nihilo est le Théâtre du Cinématographe en 1905. Il correspond plus ou moins à l’emplacement actuel du Marivaux, dont seule la façade subsiste aujourd’hui.

La localisation des salles est judicieusement choisie. Ce sont les lieux de grand passage qui sont les plus prisés, c’est-à-dire les grands boulevards de la jonction Nord-Midi (Adolphe Max, Émile Jacqmain…). Durant l’âge d’or, le boulevard Adolphe Max accueille quatre enseignes (Marivaux, Plaza, Apollo & Variétés) sur moins de cent mètres! Les vendredis et samedis soir, cela représente près de 5.000 personnes se rendant au cinéma en même temps.

Il faut dire qu’à l’époque, le cinéma est un loisir bien différent d’aujourd’hui. C’est LA sortie du week-end. Les gens s’habillent, descendent en famille de leur « faubourg » vers le centre-ville pour s’y rendre. C’est une activité à la fois populaire et mondaine. Car aller au cinéma, c’est aussi pour beaucoup profiter d’un luxe que le Belge moyen ne connaît pas chez lui. Marbres, lambris, sièges en cuir, luminaires… Les salles sont généralement luxueuses et les spectateurs en profitent. Certains restent même bien au-delà de la séance. À l’époque, les gens ne sont pas poussés vers la sortie à peine le film terminé pour remplir à nouveau la salle.

La multiplication des enseignes dans un espace restreint n’est pas un problème: le choix est tellement vaste que les salles sont assurées de faire le plein tous les week-ends. D’autant que l’offre de films se renouvèle très vite, puisque les sorties ont lieu deux fois par semaine. Jusque dans les années 60, les cinémas possèdent le plus souvent une salle unique, qui peut atteindre les 3.000 places pour les plus grands d’entre eux. Par après, pour des raisons économiques, les exploitants chercheront à les réaménager pour augmenter le nombre de salles, avec plus ou moins de succès selon les cas.

Car dès les années 60-70, avec l’avènement de la télévision et la diversification des loisirs, les cinémas commencent à péricliter. Certains ferment, d’autres sont repris, changent de nom ou d’affectation… À l’époque, personne ne voit l’intérêt de préserver ce patrimoine. Il faudra attendre 1992 pour qu’un premier cinéma bruxellois (Le Plaza) soit classé. La fin des années 80 et le début des années 90 sonnent véritablement le glas des petits cinémas de quartier. En 1988, le Kinepolis débarque à Bruxelles. À l’époque, la ville ne compte déjà plus qu’une vingtaine de salles. Beaucoup fermeront leurs portes en 1991. C’est le cas du Métropole, qui sera le dernier cinéma de la rue Neuve.

Aujourd’hui, Bruxelles ne compte plus que 13 cinémas et les gros complexes dominent le marché. Pour autant, quelques-unes des petites salles de quartier ont tenu le coup et existent toujours, parfois sous un nom différent. C’est le cas du Nova ou de l’Aventure. Les autres ont soit totalement disparus, soit tellement changé d’affectation qu’ils ne sont plus reconnaissables.

Découvrez ci-dessous une sélection non-exhaustive des anciennes salles du centre-ville de Bruxelles.

  • Deux visites guidées gratuites auront lieu durant la Nuit Blanche de Bruxelles le samedi 4 octobre prochain. Rendez-vous à 21 ou 23 heures à l’Hôtel Marivaux, 98 Boulevard Adolphe Max. Infos
  • Pour en savoir plus: Isabel Biver, Cinémas de Bruxelles – Portraits & destins, CFC Editions, Bruxelles, 2009

Marie Daffe (St.)

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