Rock Werchter: modern Talking

Werchter, this must be the place © Wouter Van Vaerenbergh
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

A 66 ans, l’ancien Talking Heads David Byrne continue de surprendre et de se réinventer. A coup sûr le concert du 44e Rock Werchter…

Il y avait du beau monde dimanche sous le soleil louvaniste. Tellement de beau monde qu’on n’a pas vu une minute de Fever Ray et à peine aperçu au loin, sur écran géant, la barbe de ce bon vieux Mark Oliver Everett. Pas de Eels donc. Mais un énorme, gigantesque, brillant, moderniste, époustouflant (les mots manquent) concert de David Byrne. Cheveux blancs, costume gris… Quand on arrive à la Barn, le fondateur des Talking Heads a un cerveau en main et lui parle. David Byrne a 66 ans mais n’a pas encore perdu la boule. Pas plus que son esprit visionnaire et son sens du déhanchement. Aucun instrument installé sur scène. Byrne est entouré de musiciens/danseurs ambulants. Tout le monde est à pieds nus, porte le même costard et a ses outils (guitare, grosse caisse, clavier…) autour du cou. Ils sont par moments jusqu’à six pour gérer les percussions et la batterie. Au début des années 2000, les Strokes avaient atteint le point de non retour du live. Les chansons jouées sans vie, dans l’ordre de l’album, en mode serial poseurs… Pour pas un balle, on aurait pu s’écouter le disque en regardant un poster. Ambiance ennui profond devenu la norme de trop nombreux concerts. Artiste total, grand intello de la musique, Byrne en est l’antithèse.. Le genre de mec qui signe un opéra disco sur l’ancienne première dame controversée des Philippines. De musicos qui figure dans le jury du festival de cinéma de Venise. Et de danseur qui se lance dans des réflexions philosophiques, sociologiques et urbanistiques autour de ses déplacements sur un vélo pliable. Rien, à part peut-être Belgique Brésil, n’a mis autant d’ambiance à Werchter ce week-end. C’est dynamique, original, entraînant, malin. A la croisée de la pop, du post punk et de la world music.

Un vieux Talking Heads (I Zimbra) par-ci. Un extrait (I Should Watch TV) de son disque avec St. Vincent par-là. Byrne et ses onze acolytes picorent. Le sexagénaire, inimitable frontman, est dans une forme éblouissante. This Must Be The Place, Once in A Lifetime et Burning Down The House mettent le feu à la grange (appelez là The Barn). Le concert est un peu écourté comparé aux Gentse Feesten une semaine plus tôt. Mais les LCD Soundsystem et les Arcade Fire du monde entier peuvent aller se rhabiller.

Il y avait aussi un plaisir assez jouissif dimanche à enchaîner sur cette sophistication après le concert brut et punk d’Idles. « FUCK England » font bien comprendre les mecs de Bristol quand un festivalier leur agite leur propre drapeau sous le nez. En calbute et en sueur, Idles crache son énervement. Les quatres zozos qui sortiront le 31 août leur deuxième album (Joy as an Act of Resistance) sont de vraies boules de nerfs. Lignée Art Brut, Sleaford Mods, Shame et tout ce que la Perfide Albion compte de furieusement contestataire. Les bières volent. Le genre de gig un peu sale comme on n’en voit pas souvent dans la Rolls Royce des festivals…

Entre le set patriote de Roméo Elvis et du Motel (pas mal pour un type qui chante en français chez les Flamands), celui tout en classe et pudeur de Nick Cave, tout en force et fureur de Nine Inch Nails (March of the pigs nous met quand même un coup de 24 ans dans les dents), les Arctic Monkeys bouclent la boucle. Terminent cette plutôt bonne édition là où ils nous avaient bluffés pour la toute première fois, il y a bien longtemps, après quelques concerts en salles empruntés. Cinq morceaux de son nouveau disque se frottent aux ancêtres The View From The Afternoon, Teddy Picker et autres I Bet You Look Good on the Dancefloor… Rendez-vous l’année prochaine: du 27 au 30 juin.

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