Critique | Musique

L’album de la semaine: Hiatus Kaiyote – Choose Your Weapon

Hiatus Kaiyote © DR
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

NU SOUL | Avec Choose Your Weapon et leur soul à tiroirs, les Australiens de Hiatus Kaiyote dégainent un deuxième album vibrant et bouillonnant.

C’est moins un disque qu’une odyssée donquichottesque. Tout au long de ses 70 minutes, il chasse les moulins funk, soul, électro, jazz… Gourmand et coloré, le second album d’Hiatus Kaiyote bouillonne en effet, frémissant de partout. Le périple est épique -adjectif qui permet de ramener directement à l’autre disque du moment, aux dimensions lui carrément gargantuesques, et chroniqué ici-même la semaine dernière: le triple The Epic de Kamasi Washington a beau s’ancrer plus franchement dans le jazz, il partage avec Choose Your Weapon un même appétit, une même envie de réinvestir un groove organique et frémissant.

Hiatus Kaiyote est une drôle d’embarcation. Groupe australien, formé à Melbourne en 2011, il est constitué de Paul Bender (basse), Perrin Moss (batterie), Simon Mavin (clavier) et Nai Palm (guitare). Cette dernière est aussi la charismatique front woman du combo. En 2012, leur premier album, Tawk Tomahawk, avait déjà fait parler de lui. Signé sur la major Sony, via le label du fameux producteur Salaam Remi (Nas, Amy Winehouse,…), le groupe s’était même retrouvé invité dans le grand cirque des Grammy Awards américains, catégorie best R&B performance, à la faveur du single Nakamarra: sur sa version « bonus », le rappeur Q-Tip y faisait même une apparition. Pas mal pour un début.

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Bestiaire soul

Ces derniers temps, le groove made in Australie était plutôt une affaire de bidouilleurs électroniques (Flume, Chet Faker). Avec Hiatus Kaiyote, il s’agit de mettre au contraire en avant un son plus « naturel ». En cela, la musique du groupe a beau souvent être taggée « future soul », elle cultive, sinon un goût pour le passé, en tout cas une admiration pour le travail de studio, le son analogique, et l’âge d’or des techniques d’enregistrement situé dans les sixties (le morceau Breathing Underwater, par exemple, est présenté comme un hommage à Stevie Wonder). Du fait main, fait maison donc. Quasi une éthique « bio » pour un disque qui ouvre grand les fenêtres, ressemblant à certains moments, littéralement, à un vrai zoo: miaulement de chats sous vocoder (Choose Your Weapon), jam avec un hibou (Only Time All The Time: Making Friends With Studio Owl), écho du perroquet du groupe, baptisé Charlie Parker…

Rappelant souvent la nu-soul d’Erykah Badu (Molasses), y compris dans ses côtés plus psychédéliques (Laputa), ce groove au naturel n’est jamais non plus une resucée passéiste post-beatnick. Sur Atari, par exemple, les beeps électroniques douchent le groove frénétique, quelque part entre Herbie Hancock et Flying Lotus. En première ligne, Nai Palm affiche l’énergie et la détermination de ceux qui ont dû grandir seul (elle a perdu ses parents très jeune, et se retrouvera baladée d’un foyer à l’autre). Sans jamais céder à la démonstration, elle épate ainsi par sa facilité à occuper tous les terrains. Glouton, Choose Your Weapon bouffe en effet à tous les râteliers, soul, funk (le bouillant Swamp Thing), latino, fusion, jazz, brésilien (Cicada)… En tous points jouissif.

DISTRIBUÉ PAR SONY.

EN CONCERT LE 03/07, À COULEUR CAFÉ, BRUXELLES.

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