Belgian summer festivals: L’heure du bilan

Le record de visiteurs cette année est détenu par Tomorrowland, avec 360 000 festivaliers sur six jours. © BELGA/Jonas Roosens
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

L’heure de la rentrée va tout doucement sonner et l’été festivalier a (bien) vécu. Ce qu’il faut en retenir.

On en compte aujourd’hui plus de 250 en Flandre et plus de 180 en Fédération Wallonie Bruxelles. La Belgique, terre de festivals. Merci. On savait. Ce dont, par contre, on ne cesse de s’étonner, c’est de leur inaltérable succès. A commencer par celui de grosses cylindrées que rien, pas même la crise, ne semble faire toussoter. Ils ont beau coûter cher, que ce soit en entrée, en bouffe ou en picole, les poids lourds de l’été n’ont jamais aussi bien marché que cette année. Sold out sur toute la ligne pour Rock Werchter (88 000 personnes par jour), Werchter Classic (60 000), le Pukkelpop (65 000) et Ronquières (15 000, 2500 en plus que l’an dernier). Records battus pour Dour (42 500 personnes par jour en moyenne) et les Ardentes (19 000)…

Les chiffres sont on ne peut plus éloquents. Le Belge aime passer les vacances dans ces grand-messes du riff et du beat. Placé sous le signe de la convivialité et de la découverte (le Micro), du week-end familial boisé (Deep in the woods) ou de la beuverie psychédélique (Rock Zerkegem), le festival cartonne tout l’été.

Il a même cette année plus souvent qu’à son tour joué la carte des prolongations. Dour comme le Pukkelpop organisent déjà depuis quelque temps des soirées le mercredi. « Pour satisfaire les campeurs et leur permettre de faire la fête, explique Mathieu Fonsny. Mais contrairement à cet été, ce n’était pas toujours explicitement annoncé. » Et si l’an prochain, le festival hennuyer proposera une vraie soirée supplémentaire, ce sera à l’occasion de Mons 2015…

Pour beaucoup, un festival reste un monde à part, où la décomplexion, la liberté de faire n'importe quoi et l'absence de responsabilités sont de mise.
Pour beaucoup, un festival reste un monde à part, où la décomplexion, la liberté de faire n’importe quoi et l’absence de responsabilités sont de mise.© Olivier Donnet

En attendant, pour des raisons de calendrier ou d’autres plus obscures, le Cactus s’est terminé un jour plus tard pour accueillir Massive Attack. Esperanzah! a commencé un jour plus tôt pour embarquer Manu Chao, puis les Francos pour ramasser Stromae. Mieux: Tomorrowland s’est pour son dixième anniversaire étendu sur deux week-ends (360 000 spectateurs sur six jours, le sold out en quelques heures). Et a annoncé qu’après les Etats-Unis, c’est au Brésil, à Sao Paulo, qu’il s’exportera dès l’an prochain.

Une marque à imposer

Au fil des ans, le festival devient souvent une sorte de bannière, d’étendard. « Un festival sur deux programme en dehors des dates officielles de début et de fin de l’événement, remarque l’Etude internationale Festivals de musique(s), un Monde en mutation. Pour une part, ces activités sont en lien avec l’enracinement des événements dans leur territoire: activités pédagogiques, autres concerts. Pour une autre part, il s’agit bien sûr d’élargir l’audience d’une marque festivalière considérée comme une valeur, culturelle et marchande.« 

Une marque. Le mot est lâché. « Des institutions traditionnellement installées sur des lieux et programmes permanents (l’Ancienne Belgique, le Botanique…, ndlr) développent des offres événementielles. Dans l’autre sens, un nombre toujours croissant d’événements (par exemple les Ardentes Club, prolongation en salle tout au long de l’année du festival liégeois, ndlr) s’inscrit dans la durée, propose des actions, des projets plutôt caractéristiques d’une offre permanente. Entrecroisement des opérateurs sur un terrain qui n’est ni tout à fait celui d’un festival au sens strict ni celui d’un établissement comme les autres.« 

Avec les 10 Days Off qui mettent la clé sous le paillasson et les festivals de musiques du monde qui ratissent de plus en plus large (le dernier Couleur Café a quand même accueilli les Girls in Hawaii, Soldout et Dizzee Rascal), l’idée même du festival spécialisé semble par ailleurs se dissoudre dans l’été.

Miser sur l'intime ou le familial, une recette qui a de plus en plus de succès.
Miser sur l’intime ou le familial, une recette qui a de plus en plus de succès.© Philippe Cornet

« Les publics musicaux, et pas seulement ceux des festivals, sont marqués par un éclectisme prononcé, même s’il se décline différemment d’une audience ou d’un groupe social à l’autre, lit-on encore dans l’étude. Il est donc logique que la diversification artistique fasse partie des stratégies d’adaptation des festivals à l’évolution de leurs audiences. » Peut-être. Mais il y a quand même quelque chose d’étonnant à voir Thee Oh Sees partager une scène et une soirée avec Patrice aux Cabarets Verts de Charleville-Mézières.

Que retenir d’autre de l’été festivalier? Quelques grands concerts (Damon Albarn, la Daptone Revue, King Khan, Nas, Timber Timbre…) et un solide nombre de daubes. La FMisation. Le manque de guitare et d’électricité. Le triomphe de l’électro et du rap. Un mort de crise cardiaque (et plus que probablement d’overdose) à Dour. Et un chapiteau qui s’écroule à la veille du Pukkelpop à cause de puissantes rafales de vent… See you next year.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content