Critique | Musique

Apple and the Three Oranges – Free and Easy

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Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

SOUL/FUNK | Dealer, voleur, Edward « Apple » Nelson a joué avec Etta James et Dr John, passé 20 piges en prison et enregistré des singles énormes mais méconnus. Anthologie.

APPLE AND THE THREE ORANGES, FREE AND EASY, DISTRIBUÉ PAR NOW AGAIN/V2. ****

Surnommé Apple à cause de sa tête en forme de pomme, Edward Nelson est né à la Nouvelle-Orléans dans le quartier de Tremé bien avant qu’il soit dévasté par Katrina et donne lieu à une série HBO. Abandonné par son père à l’âge de deux semaines, Edward est élevé par sa mère et tombe rapidement fou amoureux de la musique qui fait battre le coeur de la ville croissant. Les Meters quand ils s’appelaient encore les Hawkettes, Professor Longhair, Eddie Bo, Louis Armstrong…

A 18 ans, il grimpe dans une petite Pontiac déguenillée et prend la route pour l’ouest avec ses batteries, quelques vêtements et une canne à pêche histoire d’attraper sa nourriture en chemin. Arrivé chez sa tante, à Los Angeles, il rejoint les blues band de Johnny Morrisette et Johnny Guitar Watson… Fin 60, il a déjà enregistré avec Watson et Etta James, tourné avec les Whispers et Johnny Taylor. Son style de batterie louisianais charme les producteurs et les artistes de renom en quête d’un son funky.

Les quelques faces aussi remarquables soient-elles gravées par le bonhomme début des années 70 avec ses trois Oranges n’en restent pas moins confinées à l’anonymat. Apple Nelson lance son propre label, Sagittarius, enregistre une poignée de singles… Rien n’y fait. Sans doute la faute à leur son résolument lo-fi, témoignage brut du passé, qui aujourd’hui fait toute leur personnalité. Ou peut-être à son tempérament de filou…

Pour fans des Meters et de James Brown…

Pour soutenir sa carrière, éponger ses factures de téléphone, payer ses tickets de train, Edward Nelson fait plus que flirter avec l’illégalité. Il vole les riches à Hollywood et Bel Air. Deale à South Central. « Je vendais à des adultes. Pas à des gosses », précise-t-il au LA Weekly. « Les gens me demandaient ce que je foutais dans la rue. Je gagnais du fric pour sortir des disques. Voilà ce que je faisais. »

Tandis qu’il fourgue héroïne, cocaïne et cames diverses, Apple enregistre en studio des chansons brise coeurs telles qu’I’ll Give You A Ring (When I Come if I Come) et Love Brings Out The Best Of You. Il paye ses musiciens avec de l’herbe et de l’alcool. Emballe, même fauché (Dr John et Solomon Burke lui devraient encore du pognon aujourd’hui) et affamé, des filles deux fois plus jeunes que lui…

Beautiful loser, imprévisible et paradoxal, capable d’écrire et chanter un morceau sur l’une de ses maîtresses en en faisant entonner les choeurs par sa femme, il effectue trois séjours et passe une vingtaine d’années en prison (il en est sorti depuis 2002). Ses master tapes disparaissent dans le déchainement sauvage de l’ouragan Katrina et ses rares plaques encore trouvables, les collectionneurs se les arrachent à prix d’or. Bref. Cette anthologie est un objet indispensable qui plaira aux fans de James Brown, de Sly Stone et des Meters. Une tuerie qui s’ouvre avec le renversant What Goes Around Comes Around d’Arthur Monday (sur lequel Apple joue de la batterie). Funk you very much.

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