Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Depuis bientôt trois ans, les soirées les plus hype se passent sur le Net. Bienvenue dans le Boiler Room!

Vous vous rappelez de MTV The Grind? Cela se passait dans les années 90. Sur une plage de Malibu, ou au bord d’une piscine, un DJ balançait de la dance et du hip hop pour une petite foule de beautiful people en maillots et autres créatures blondes en bikinis. Le concept était censé faire rêver et pousser à la « party ». Vu de son salon, les déhanchements des kékés en shorts paraissaient surtout fort ridicules. Dans les années 70, il y avait déjà eu l’émission Soul Train. Mais en pleine fièvre disco-funk, les danseurs à coupe afro avaient tout de même une autre dégaine -un petit coup d’oeil sur YouTube suffira pour s’en convaincre.

Aujourd’hui, signe des temps, c’est sur le Net que cela se passe. Par exemple sur un site comme Boiler Room. Le concept est simplissime: un endroit secret, un DJ, quelques happy few, et une caméra pour diffuser la soirée en direct sur le Net. C’est en tout cas comme ça que l’affaire a démarré. A Londres, très précisément, où l’on s’y connaît en « house » party et en radios pirates, une véritable tradition locale. Un jour, Blaise Belville, journaliste du Webzine Platform, invite son ami Thristian Richards ainsi que Femi Adeyemi (fondateur de la Web-radio londonienne NTS) à passer au bureau. Il leur propose de mixer une compile en direct et de diffuser la session sur la plateforme de streaming UStream. Le lendemain, ils remettent ça mais en invitant cette fois tous leurs potes pour une fête en bonne et due forme. La sauce prend. Les sessions se multiplient, élargissant petit à petit leur audience. Surtout que les DJ’s invités à se produire dans la Boiler Room sont devenus de plus en plus prestigieux: de James Blake à Erykah Badu en passant par Thom Yorke, Flying Lotus…

Aujourd’hui, le show, sponsorisé, se décline sur quatre bases principales: Londres, Berlin, New York et Los Angeles. Mais les « délocalisations » ont tendance à se multiplier. Récemment, une Boiler Room s’est ainsi déroulée dans un appart chic de Paris, avec notamment Ivan Smagghe aux platines. Le concept s’est aussi ouvert aux lives -dernièrement, Rhye ou… Baloji s’y sont collés! Les set DJ restent malgré tout l’ADN du concept. Avec quelques règles de base qui n’ont quasi pas changé. Comme le principe du streaming live, organisé dans un endroit tenu secret, pour une fête en petit comité. Autre caractéristique: le fait que le DJ mixe face caméra, avec le public dans son dos. De quoi en déstabiliser plus d’un…

Îlot

Suivi depuis son écran de laptop, dans le divan de son salon, l’intérêt est évidemment limité. C’est le problème éternel des retransmissions télévisées: elles ne remplaceront jamais l’expérience concrète de la soirée ou du concert, la sono qui fait valser le plexus, l’immersion dans la foule… « Je ne pense pas qu’il y ait quoi que ce soit d’excitant à nous regarder mixer devant une quarantaine de hipsters dans un entrepôt gelé de Dalton », explique Dan Foat, un des boss anglais du label R&S. Avant de reconnaître le rôle positif que joue malgré tout la Web télé pour les musiques électroniques. De fait. A l’heure où la dance a mis la main sur la musique pop et où les festivals mammouth donnent le ton (cf. Tomorrowland), l’esthétique intimiste et alternative de la Boiler Room fait presque figure d’îlot préservé…

LAURENT HOEBRECHTS

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