CINEMA INCH’ALLAH!, LE PREMIER LONG MÉTRAGE DU DUO DE RÉALISATEURS BRUXELLOIS, DRESSE LE PORTRAIT DE QUATRE CINÉASTES BELGO-MAROCAINS. DRÔLE ET PERTINENT.

Depuis qu’ils travaillent à quatre mains, l’un s’occupe de l’image, et l’autre du son. Prolongement logique: lorsqu’on les rencontre au festival de Namur, c’est tout naturellement que le premier, Guillaume Vandenberghe, laisse au second, Vincent Coen, le soin d’énoncer leur pensée, qu’il vient appuyer à l’occasion. Bruxellois, ces deux-là se connaissent depuis l’adolescence, lorsqu’ils officiaient au sein d’un même groupe punk, expérience dont ils ont conservé le goût du Do It Yourself. Ainsi de Cinema Inch’Allah! ( lire critique page 31) , un premier long métrage documentaire qui les a vus partir à la rencontre de Farid, Reda, Noon et Mohamed, quatre cinéastes belgo-marocains bruxellois mus par la passion et l’amitié; les auteurs de quelque 33 films d’action au budget inversement proportionnel à leur enthousiasme, et aux titres aussi évocateurs que Jamal Disco, Ghost Cop ou encore Unité Spéciale Marocaine. C’est du reste la découverte de ce dernier, présenté au Festival du Film Indépendant de Bruxelles, qui a fait office de déclencheur du projet: « On trouvait ce mix entre Jackie Chan et Louis de Funès, avec une couche de satire et de critique sociale, tellement frais et excitant qu’on s’est dit: « Imagine-toi de pouvoir faire un portrait à travers eux, et de suivre le tournage de leur prochain film en guise de cadre » », se souvient Vincent Coen, ignorant alors que l’expérience allait les mobiliser pendant quatre ans.

Convergence d’intentions

Parti sur un canevas évoquant celui des Cinéastes à tout prix de Frédéric Sojcher, avec encore « le thème de l’autoreprésentation comme accroche initiale », Cinema Inch’Allah! échappe bientôt au schéma imaginé par ses réalisateurs. Certes, il y a bien là le portrait de francs-tireurs « issus d’une minorité sociale », alliant au sens de la débrouille celui de l'(auto)dérision, en un cocktail particulièrement savoureux. Et, partant, une £uvre questionnant le pouvoir du cinéma, tout en s’employant à battre en brèche préjugés et stéréotypes -ceux-là même que combattent ses protagonistes. L’imprévu s’y fraye pourtant un chemin, la place croissante prise par la religion faisant craindre un temps aux réalisateurs d’ « avoir perdu leur film ». A l’autopsie, on peut dire que celui-ci y a gagné en richesse, élargissant sa mosaïque de thématiques.

Entre vérité humaine et cadre communautaire, on est encore tenté de voir dans Cinema Inch’Allah! le pendant documentaire des Barons de Nabil Ben Yadir. « On travaillait depuis deux ans sur notre film lorsque Les Barons sont sortis. Et Nabil faisait partie de leur groupe d’amis lorsqu’ils étaient plus jeunes. Pour nous, ces deux films sont parallèles. Les Barons nous a aussi aidés à cadrer des thèmes comme le fait de grandir et réussir chez nos personnages. En ce sens, ce fut une inspiration », opinent-ils. On peut d’ailleurs conclure sur une convergence d’intentions. Soit, dans le chef de Vincent Coen et Guillaume Vandenberghe, « donnerune autre image de la communauté belgo-marocaine (…) et exprimer un regard personnel et subjectif sur les personnes réelles qui se trouvent derrière les clichés ». Pari relevé haut la main…

JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS

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