Parfois plus connus que les vidéos officielles, les clips de fans pullulent sur Internet. Pour le meilleur et pour le pire.

Alors qu’on en passe de moins en moins à la télé, que MCM et MTV ont abandonné le terrain pour celui, miné, des feuilletons, des émissions à la con et de la téléréalité, les clips résistent. Font leur vie sur MySpace, YouTube, Daily-motion et les bonus disc qui obnubilent aujourd’hui tant l’industrie de la musique. Mieux, grâce à l’évolution technologique, ils sont entrés dans une ère nouvelle. Une ère participative qui voit les fans, auditeurs, consommateurs (appelez-les comme vous voulez), réaliser eux-mêmes ceux de leurs artistes préférés.

Le premier clip de fan reconnu, ou du moins son ancêtre, a vu le jour en 1975 et il est l’£uvre de Kandy Fong. Inspirée par le film Yellow Submarine des Beatles, Fong sélectionne à l’époque des séquences de Star Trek et les synchronise avec de la musique. Son travail est moins l’£uvre d’une fanatique de pop et de rock que de Spock et de ses grandes oreilles. Ses petites créations personnelles, Fong les présente dans des conventions et des rassemblements de trekkies. A l’aide d’un et ensuite de 2 projecteurs de diapositives. Puis, au début des années 80, en se réorganisant avec des magnétoscopes.

Ringards et sans intérêt, les clips réalisés par les fans se sont longtemps résumés à des compilations d’extraits de films, de séries américaines et de souvenirs de vacances. Les vidéos artisanales ont néanmoins évolué. La plupart ne valent toujours pas tripette mais d’autres se révèlent plus intéressantes voire célèbres que les clips officiels et relèvent d’un vrai travail de réalisation.

Les groupes ne s’y trompent pas.  » Un clip conçu par des fans pour la chanson Kids de MGMT a été vu 28 millions de fois sur YouTube tandis que l’officiel, il est vrai sorti plus tardivement, a attiré beaucoup moins de curieux. Ben Goldwasser et Andrew VanWyngarden l’ont remarqué et ils ont invité ses personnages principaux à apparaître dans le clip d‘Electric Feel », raconte Nicole Benz. Nicole, épaulée d’un autre étudiant, a réalisé un incroyable clip de Belle and Sebastian (pour Another Sunny Day) comme travail de fin d’étude.  » Nous avons ensuite été contactés à plusieurs reprises par des groupes et nous avons accepté d’en monter un autre pour Vendor Defender, un projet de Glasgow sans label. Pour les artistes relativement inconnus qui ne peuvent pas se payer un clip professionnel, les vidéos imaginées par les fans représentent une occasion unique de faire parler d’eux, d’obtenir un peu de visibilité. »

Make my video

Certains groupes en panne d’inspiration organisent des concours via Internet. Ce fut le cas des vieux Anglais de Prodigy à la sortie de Run with the wolves il y a quelques mois. Le gagnant a vu son clip devenir la vidéo officielle du morceau et il a empoché la somme de 3500 euros en guise de récompense. Une pacotille comparé aux 25 000 dollars déjà remis en 1986 à l’heureux élu des milliers de candidats ayant participé au Madonna’s Make My Video Contest. A l’époque, Sire Records et MTV cherchaient autant un clip à True Blue qu’un joli coup de pub.

The Divine Comedy a organisé ce même genre d’épreuve pour To Die A Virgin, extrait de Victory for the comic muse (2006).  » J’aime mes fans. Je veux tous les embrasser. Ils me permettent de vivre de la musique, explique Neil Hannon. Mais je ne cherche pas à les impliquer dans mon développement artistique. Désolé, c’est très vieille école. Je pense que certains groupes désirent même que le public leur écrive des chansons et mixe leurs albums. Allez vous faire foutre. Je mixe mes disques moi-même. (rires)  »

L’intérêt, selon lui, est plus pragmatique.  » Il est important de ne pas dépenser trop d’argent dans ce genre de choses. Surtout pour un artiste comme moi. Quelle chaîne de télé sur le câble diffuserait un clip de Divine Comedy? Bien sûr, il y a YouTube. Mais les gens regardent ça en streaming en mauvaise définition. Claquer de l’argent dans un clip, c’est jeter son argent par les fenêtres. »

Ceux de ses fans lui ont laissé des avis mitigés.  » Certains avaient vraiment de l’allure mais ce n’est pas comme si nous n’étions tombés que sur des trucs terriblement intéressants. Plus qu’à des déficiences techniques, ce au-dessus de quoi je passe aisément, ils étaient confrontés à un manque cruel d’idées. Comme les originaux en somme… Pour tout vous dire, je n’aime pas trop les clips en général. D’ailleurs, même si on fait de notre mieux, la plupart des nôtres sont nuls. » l

Texte Julien Broquet

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