Si le western a beaucoup donné à Clint Eastwood, et notamment le commencement de sa notoriété, ce dernier le lui a bien rendu, valant au genre quelques-unes de ses lettres de noblesse. Et même, avec Unforgiven, une épitaphe aussi crépusculaire que définitive, démythifiant, sur les pas d’une ancienne gâchette reprenant une dernière fois du service, l’Ouest pour en restituer la sauvagerie. Et refermant, ce faisant, la boucle du western hollywoodien, à rebours de la légende. Soit un classique absolu, certifié par quatre Oscars, dont ceux du meilleur film et du meilleur réalisateur pour Eastwood, manière exemplaire d’en finir, incidemment, avec un large pan de sa carrière.

Will Munny, le fantôme laminé de ce western désenchanté, ponctue en effet une lignée de personnages auxquels Eastwood a su apporter l’étoffe et le laconisme requis, au service de motivations mouvantes. Un moule inauguré par « l’homme sans nom » léonien, auquel il s’emploiera à donner divers successeurs, au tournant des années 60 et 70 en particulier, où sa filmographie se peuple des Jed Cooper (Hang ‘Em High, de Ted Post), Hogan (Two Mules for Sister Sarah, de Don Siegel) ou autreJoe Kidd (dans le film éponyme de John Sturges). Après quoi l’acteur ne laisse à nul autre le soin de réaliser High Plains Drifter (L’Homme des hautes plaines), western d’anthologie sous forte influence spaghetti, dont le héros, campé par ses soins et mû par un inextinguible désir de vengeance qui le conduira à transformer la ville de Lago en un bled peint de rouge et de sang, annonce à sa façon Josey Wales, mais aussi le prêcheur/ange exterminateur de Pale Rider. De quoi, en tout état de cause, assurer à Eastwood une place au panthéon du plus américain des genres cinématographiques.

Difficile, par ailleurs, de ne pas voir dans divers personnages de justiciers à la morale toute relative qu’il incarnera encore, et en particulier dans Harry Callahan, le héros des Dirty Harry, une extension de sa figure westernienne. Une transition d’ailleurs limpidement inscrite dans Coogan’s Bluff, réalisé par le même Don Siegel en 1968, où son personnage de shériff arizonien mal dégrossi fait sensation dans la New York psychédélique où l’a conduit une enquête (et où ses bottes et son stetson lui valent le sobriquet de Texas). La Frontière a disparu et le désert s’est transformé en décor urbain; les méthodes n’ont pas changé pour autant, pour un résultat d’ailleurs voisin. Impitoyable, avec, toutefois, un soupçon d’ironie en sus… ?

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