Si son expérience de cinéaste se limitait, avant A Hijacking, à R, drame carcéral cosigné avec Michael Noer, Tobias Lindholm présente par contre un CV de scénariste déjà bien étoffé, qui l’a vu, depuis sa sortie de la National Film School of Denmark en 2007, se multiplier au cinéma comme à la télévision. C’est d’ailleurs pour le petit écran qu’il a débuté, se faisant la main sur la série The Summers, avant d’enchaîner avec la cultissime Borgen, dont il a signé une vingtaine d’épisodes. Quant au cinéma, son nom y est associé à celui de Thomas Vinterberg, pour qui il a écrit les scénarios de Submarino et The Hunt, ce dernier lui valant d’être récompensé aux European Film Awards notamment.

Lorsqu’on l’invite à comparer les deux médias, Lindholm s’attarde surtout sur le monde les séparant. « La télévision et le cinéma sont deux choses totalement différentes, commence-t-il. La télévision requiert des outils spécifiques: il ne s’agit pas de convaincre des gens d’acheter un ticket, mais on y est chaque jour en concurrence avec 50 autres chaînes, pour des spectateurs zappant sans arrêt, et qui vont vous planter là si votre histoire ne les intéresse plus. Il faut donc veiller à ménager des rebondissements réguliers, pour que le public ne décroche pas. » Et d’évoquer, dans le même élan, des structures narratives divergentes: « Un film, c’est généralement un personnage qui voyage pendant un temps déterminé, et qui évolue. A la télévision, on ne sait jamais quand cela va prendre fin, parce que si le public réclame une saison supplémentaire, vous la lui fournirez. Une série ressemble à un aquarium rempli de poissons que l’on regarde sous un angle différent, épisode après épisode. Les personnages doivent donc rester plus ouverts. »

Quant à savoir dans quelles eaux le scénariste navigue le plus volontiers? « J’aime faire de la TV, mais c’est fort exigeant, parce qu’il faut concilier beaucoup d’intérêts. » Sans même parler d’un format par définition contraignant: « On sait qu’un épisode fait 58 minutes, moins le générique. Alors qu’un film, on n’en connaît pas la durée avant d’entrer dans la salle de montage. La télévision vous impose une structure prédéfinie, alors que le cinéma vous laisse la place de chercher. Mais si j’ai parfois l’impression de m’acquitter d’un boulot avec la première, j’y prends aussi du plaisir parce que c’est plus un truc de scénariste: il faut être efficace, distrayant et palpitant pour tout le monde, vibrer au diapason d’une femme de 58 ans comme d’un gosse de 5, et les maintenir dans une même histoire. Ce que je ne vais pas nécessairement m’imposer dans un film. » Et de conclure: « Pour le moment, c’est au cinéma que je m’épanouis: je suis sensible à l’idée de créer quelque chose d’un peu plus lourd, et qui ne va pas disparaître aussitôt après sa diffusion. J’ai l’impression qu’un film peut plus voyager, et rester. Cela me paraît plus difficile pour la télévision, tant on y est bombardé d’informations… Ce qui ne m’empêche pas de penser y revenir après les projets de cinéma auxquels je travaille actuellement. » Suite au prochain épisode, suivant l’expression consacrée…

J.F. PL.

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