Un homme meilleur

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En 1982, Sydney Pollack signait une brillante comédie sur les rapports hommes-femmes, doublée d’une satire des milieux du spectacle.

Rare incursion de Sydney Pollack dans le domaine de la comédie, Tootsie reste, à près de 40 ans de distance, une référence en la matière. Une question de mesure, sans doute, le réalisateur des Trois jours du Condor ayant trouvé le ton juste en choisissant de donner au propos un tour vraisemblable, avec le concours inestimable de Dustin Hoffman. Acteur talentueux mais insupportable pinailleur, Michael Dorsey (Hoffman) voit toutes les portes se fermer -situation que résume laconiquement son agent, George Fields (Pollack): « Tu es trop chiant, personne ne t’engagera, ni à New York, ni à Hollywood. » À quoi le comédien, piqué au vif, va répliquer en changeant discrètement d’identité et en se rendant aux auditions pour le soap Southwest General sous les traits de Dorothy Michaels, une femme dont l’autorité naturelle et l’énergie ont tôt fait de convaincre les producteurs de la série. Tootsie, ainsi qu’on la surnomme, n’est toutefois pas au bout de ses peines, se retrouvant bientôt prisonnière de son subterfuge, situation inextricable aux conséquences multiples sur son existence.

Un homme meilleur

Le scénario est admirablement ficelé, Pollack en tire une comédie pétillante, signant un drôle et émouvant portrait de femme tout en abordant les rapports hommes-femmes comme les notions d’identité sexuelle sur arrière-plan de satire du monde du spectacle. Et le film d’apparaître comme un modèle de doigté, de pertinence et d’humour, porté par une épatante distribution, où brillent encore Jessica Lange, Teri Garr et Bill Murray. Pour autant, le projet ne s’est pas monté sans mal, et la plongée dans les archives réunies par Carlotta pour cette édition ultra-collector se révèle un véritable régal. Le remarquable récit de tournage écrit par Susan Dworkin se trouve prolongé par deux making of, réalisés respectivement en 1982 et en 2007. L’on est loin, ici, de la langue de bois et du vernis promotionnel présidant généralement à ce type d’entreprise, tant Hoffman que Pollack y revenant sur les différends les ayant opposés. Tootsie était un projet par l’acteur, qui en avait peaufiné l’idée, choisi le titre (qui lui venait de sa mère), et imposé le réalisateur, Hal Ashby. Des conflits d’agenda déboucheront sur l’engagement de Pollack, des frottements à la clé: « La relation entre Dustin et moi est compliquée. Il a lancé le projet, c’est lui qui le contrôlait, il a dû tout me déléguer. C’est une guerre amicale, mais nous sommes constamment dans une querelle artistique. » À quoi l’acteur répondait: « Selon moi, tous les bons films doivent être une bagarre. C’est quelque chose de sain. » Le résultat semble lui donner raison, l’histoire de cet homme devenu meilleur en prenant, pour un temps, l’identité d’une femme faisant désormais figure de classique.

Tootsie

Comédie De et avec Sydney Pollack. Avec Dustin Hoffman, Jessica Lange, Bill Murray. 1982. 1 h 56. Éd. Carlotta. Dist: Coming Soon.

8

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