Top of the box

© PHILIPPE CORNET

Les premiers 78 tours, il y a plus d’un siècle, ne font pas de grands frais d’emballage: généralement, une simple feuille de papier cartonné annonce plutôt le label que l’artiste. Fin des années 40, le format LP intronise peu à peu l’objet pochette comme représentation iconique, volontiers sublimée, du disque concerné. La richesse et la créativité visuelle comptent désormais, parfois autant que la musique, dans l’attractivité du produit. D’où des apparitions esthétiquement soignées: le double Odessa en volume cartonné rougeoyant des Bee Gees, mars 1969, ou encore le triple solo, nouveauté pour l’époque, de George Harrison, All Things Must Pass, novembre 1970. L’ex-Beatles récidive d’ailleurs fin de l’année suivante avec les trois disques de The Concert for Bangladesh, dans un élégant box orangé. Il faut attendre les eighties pour que les compagnies de disques saisissent la potentielle rentabilité des intégrales et se mettent à emballer les carrières discographiques. Avec quelques exceptions hors biographie musicale de stars, comme le Metal Box de PIL, fin 1979, onéreux et encombrant dans son improbable boîte de film. Curieusement, c’est l’avènement du CD, petite chose synthétique aux micro-pochettes frustrantes, qui accélère le processus de l’inventivité conceptuelle et du design. Et fabrique, surtout au XXIe siècle, la conception de boxs 3D plus ou moins loufoques, intéressants, classes, tarabiscotés ou non. Offrant inédits, commentaires, photographies, notes et brols divers. Genre reproductions de passe backstage ou programme de tournée. Développant souvent l’emballage d’après une chanson de l’artiste concerné, ou un élément incarnant son parcours, comme la compilation Motown dont il est aussi question dans ces pages. à moins que l’objet, de préférence vendu à un prix élevé, ne recycle une ancienne idée et ne se décline dans d’improbables artefacts à tirage limité. Les Who et leurs haricots.

David Bowie

« Heathen » 2002

De retour sur le marché américain, Bowie y signe son plus gros succès commercial en pratiquement deux décennies. Et comme objet promo -collector en principe réservé aux journalistes, people et gens de l’industrie- il imagine un porte-cigarettes métallique qui peut également servir de flasque à alcool. À boire et à fumer, mais pas un gramme de musique dans l’objet.

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Johnny Hallyday

« Collection Hallyday » 1993

Résumé en quarante CD -excusez du peu- dans une caisse de guitare, grandeur nature. Toujours minimaliste, l’Elvis français couronne alors une discographie pléthorique qui compte pas loin de 40 compilations, ainsi que 30 albums live, depuis les sixties. Sur les sites d’occase, ce Johnny-là peut aller chercher dans les 2 000 euros…

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Divers

« Motown Hitsville USA » 2008

Lorsque le patron Berry Gordy achète en 1959 une maison pour les bureaux de son label, au 2648 West Grand Boulevard à Detroit, il ne se doute pas qu’un demi-siècle plus tard, la bâtisse sera reproduite en un coffret célébrant son prestigieux catalogue. Un objet 3D en carton renforcé où il faut enlever le toit pour en sortir cinq doubles CD d’étourdissante musique.

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The Clash

« Sound System » 2013

L’ultime trace discographie du groupe: sept CD et un DVD, omettant quand même l’ultime et dispensable Cut the Crap, de beaux magazines à textes et photos, du brol memorabilia. Et même un carnet de note vierge où vous écrirez vos sentiments. Le tout dans une reproduction, carton fort, d’une boombox -radio et lecteur CD portable- que trimballait fréquemment le bassiste Paul Simonon.

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Bjork

« Biophilia: Ultimate Art Edition » 2011

Originellement vendu au-delà de 800 dollars, le coffret est le plus chic des trois variations déclinées du septième album de l’elfe islandaise, explorant les liens multiples entre nature et technologie. Dans une boîte boisée, Björk propose, entre autres, dix diapasons, chacun donnant le ton des dix chansons de l’album. Tiré à 200 exemplaires, le box est quasi culte… et introuvable.

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The Who

« The Who Sell Out » 2021

L’actuelle réédition de The Who Sell Out, originellement sorti en décembre 1967, est classique: coffret en cinq CD, deux singles vinyles, 47 inédits, bouquin de 80 pages. Le must de l’opération est la sortie de 50 boîtes de conserve signées par Daltrey et Townshend, en collaboration avec la firme Heinz, fabricant de haricots sauce tomate. Le rapport? Sur la pochette de 1967, Daltrey prend un bain de ces légumes ketchup.

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Public Image Limited

« Metal Box » 1979

Vénère, John Rotten Lydon l’est pleinement fin 1979, lorsqu’il survole d’une voix de harpie la seconde parution discographique de PIL. Soit une boîte métallique comme celles utilisées pour les films 16 mm, renfermant trois maxis aux chansons graveleuses, genre Swan Lake ou Poptones. La chose, chère à l’achat, écoulera ses 60 000 exemplaires avant de reparaître assez vite en format LP classique l’année suivante.

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Bruce Springsteen

« Luck Town & Human Touch Limited Edition » 1992

En vacances de son E Street Band -à l’exception du claviériste Roy Bittan-, Springsteen a la bizarre idée de sortir le même jour de mars 1992 deux albums différents. Bien que Human Touch soit considéré comme inférieur à Lucky Town, la paire est rassemblée dans une précieuse boîte en acajou, d’une fabrication limitée à 2 000.

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The Durutti Column

« The Return of the Durutti Column » 1980

Geste iconoclaste de la part du label Factory, ce premier album du guitariste existentiel Viny Reilly débarque sur le marché avec une couverture en papier de verre. Matière davantage utilisée pour le ponçage que pour le packaging de disques. D’autant que cette substance ne fait pas de cadeaux aux autres vinyles qui s’y frottent. Cette rareté a bénéficié d’une réédition en 2014, via une autre variation, moins dangereuse, de papier.

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Alain Bashung

« Les Hauts de Bashung » 2002

S’il n’y avait qu’une (quasi-)intégrale à retenir… Ce coffret de forme classique offre une plongée pulpeuse dans la carrière de l’Alsacien en pas moins de 18 CD et un DVD. Hormis un livret intéressant -pour son écriture et ses photos-, c’est bien la musique qui s’impose ici, au-delà de tout artifice d’emballage, pour son intrépide grandeur nature. Un régal.

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