We’re a happy family – L’arrivée d’une famille idéale au bonheur démonstratif met une petite communauté américaine sens dessus dessous. Une comédie acide et savoureuse.

De Derrick Borte. Avec David Duchovny, Demi Moore, Amber Heard. 1 h 36. Sortie: 17/11.

Demi Moore au générique d’un film, voilà qui est le plus souvent synonyme de catastrophe annoncée: sans remonter jusqu’à Ghost, la dernière sortie intéressante de l’actrice date, au bas mot, du siècle dernier (les amateurs de Charlie’s Angels nous pardonneront). Et ce n’est pas l’annonce de sa participation prochaine au remake de Lol qui semblait de nature à redresser la barre: au baromètre du nanar, Demi, c’est toujours more…

Ce préambule pour dire que c’est avec une certaine appréhension que l’on a découvert The Joneses, un premier film s’appuyant sur un couple de stars à l’étoile déclinante, Miss Moore et David Duchovny. Et là, divine surprise: en lieu et place de la roucoulade faisandée redoutée, une comédie acidulée comme l’on n’en avait plus goûté depuis un moment déjà. Flanqués pour le coup de Amber Heard et Ben Hollingsworth, voilà que Demi et David composent les Jones -Kate, Steve, Jennifer et Mick (soit, cela dit en passant, des patronymes éveillant des souvenirs rock et cinéphiles à la fois)-, famille modèle débarquée, toute opulence et charme dehors, dans quelque banlieue américaine aisée. A peine ont-ils emménagé dans leur villa, modèle elle aussi, que débute une opération séduction à laquelle succombera bientôt tout un chacun. Du golf au salon de coiffure, en passant par le lycée, la collectivité n’en a bientôt plus, en effet, que pour les Jones, leur beauté, leur aisance, leur confort dernier cri, leur bonheur démonstratif de famille idéale semblant descendue d’un Olympe comme l’inventeur du rêve américain aurait à peine osé en imaginer un. Et de générer dans leur sillage une traînée d’envie…

Le déclin de l’empire matérialiste

Qu’il y ait là quelque dessein inavoué, on en a rapidement la conviction. Au départ de ce canevas, Derrick Borte signe pour sa part une comédie satirique de jubilatoire facture, démontant avec un allant jamais pris en défaut l’empire du matérialisme à tous crins, et de nos modes comportementaux où le suivisme le dispute à l’avidité -vaste propos embrassé avec style, humour acide, ironie et légèreté, encore que le film soulève bientôt quelques dramatiques enjeux.

On doit à la vérité d’ajouter que ces Joneses, décidément trop beaux pour être honnêtes, adoptent, sur le tard, une courbe rentrante, histoire sans doute de rencontrer les canons d’un conformisme hollywoodien relatif. Mais si l’on imagine ce qu’aurait pu donner une telle histoire devant la caméra d’un Todd Solondz, par exemple, on ne boude pas son plaisir pour autant: voilà un film qui, sous ses airs d’inoffensif divertissement des familles, enfonce un coin joliment subversif dans le modèle de la société de consommation, et ses mécanismes. Le tout, aussi adroitement ciselé que finement exécuté -mais on savait également que Demi n’était pas du genre à faire les choses à moitié…

Retrouvez toute l’actualité cinéma commentée par Jean-François Pluijgers, chaque mercredi à 8 h 30, sur Musiq3.

Jean-François Pluijgers

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