Sous la peau

Une journée « normale » dans la vie d’une jeune femme, plus précisément dans sa tête, où le flot des pensées ruisselle, s’agite, à chaque seconde. « (…) je dois faire ce truc à nouveau, le truc de me lever, le truc de la journée, le truc du travail, (…) » Arrivée à son bureau tant redouté, elle pense à son mec, son lui, pour que la journée passe plus vite. Lui qui ne sait pas, à qui elle voudrait pouvoir dire ça: l’origine de ses démangeaisons, de cette peau qui la brûle, des croûtes à l’arrière du genou, dire son agression sexuelle. Rebecca Watson adopte la technique littéraire du stream of consciousness (courant de conscience), popularisé par Joyce, Virginia Woolf ou Claude Simon. Bruits, gestes et odeurs se déposent sur la page comme des épluchures, dans leur dimension sensorielle et fragmentaire. Explosant la mise en page de son texte, l’autrice architecture ces bribes comme elles lui viennent, les couche sur la page comme des notes sur une partition. Comme avec des peaux mortes, elle en gratte tous les sursauts. Cette scansion graphique entraîne une lecture à la fois verticale et horizontale de son robinet mental. Tout noter, poinçonner chaque pensée flottante qui jaillit, fugace, incohérente, sans discontinuer. « Pour ne pas exploser en morceaux ».

De Rebecca Watson, éditions Grasset, traduit de l’anglais par Julia Kerninon, 288 pages.

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