Sans peur, sans pitié

Prix du jury lors du dernier festival de Cannes, Bacurau, de Juliano Dornelles et Kleber Mendonça Filho, rendait hommage au film de cangaço ayant fleuri au Brésil dans les années 50 et 60, et mettant en scène le banditisme social qu’avait connu le Nordeste au tournant du XXe siècle. Elephant Films a l’excellente idée de sortir aujourd’hui Sans peur, sans pitié ( O Cangaceiro), le film qui jetait, en 1953, les bases d’un genre typiquement brésilien, doté de sa mythologie propre, même si également inspiré, à la source, par le western américain. L’action se situe à  » une époque imprécise » , alors que le capitaine Galdino Ferreira et ses hommes, des bandits d’honneur, font régner la peur sur le Sertão,  » un pays où, normalement, on ne peut pas vivre, et où pourtant on survit« , comme le pose Jean-Pierre Dionnet dans sa présentation. Lors du sac d’une petite ville, les brigands enlèvent Olivia, l’institutrice, afin d’en tirer une rançon. L’un d’eux, Teodoro, ne tarde pas, toutefois, à tomber éperdument amoureux de la belle captive, bravant l’autorité d’un chef impitoyable… L’intrigue est classique, où le film d’aventures trouve des accents mélodramatiques, la chronique réaliste adopte les contours de ce que l’on appellera le « Nordestern ». Le tout composant une oeuvre singulière, inscrite dans l’imaginaire brésilien et baignée de chants populaires ( Mulher rendeira, qui ouvre et referme l’histoire), sur laquelle Barreto appose une griffe inspirée, tirant le meilleur parti de la sécheresse du Sertão, tout en jouant à bon escient des gros plans et autres suspensions de rythme. Non content de générer une longue descendance brésilienne (via, notamment, Glauber Rocha), le film, immense succès à l’époque, déteindra également sur le western spaghetti… À découvrir.

De Lima Barreto. Avec Alberto Ruschel, Marisa Prado, Milton Ribeiro. 1953. 1 h 32. Dist: Elephant.

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