Geert Zagers Journaliste chez Knack Focus

ILS ONT SYMPATHISÉ AUTOUR DE LEUR AMOUR COMMUN POUR LES MUSIQUES DE FILMS TRANSALPINES. ENTRETIEN CROISÉ.

Quand on entend « musiques de films italiens des sixties », on pense Visconti, Fellini, Antonioni. Vous êtes davantage dans le cinéma d’exploitation…

Daniele Luppi: C’est vrai. Sur cet album, nous avons laissé parler notre attrait pour les bandes originales de la fin des années 60. Celles qui ont succédé à la vieille école de Nino Rota, plus proche de la musique symphonique. On aime le côté dramatique, décadent et sombre du milieu des sixties.

Danger Mouse: Nous avons utilisé les mêmes musiciens, écrit une musique qui avait le même genre de feeling. Mais il s’agit de la toile de fond des chansons. Nous n’avons pas cherché à reproduire les B.O. du passé. A dire: les mecs, nous aussi on peut faire ce que vous faisiez il y a 50 ans. Nous voulions plutôt proposer quelque chose de nouveau ou à tout le moins de différent. Certains grandissent en écoutant les Beatles et les Stones. Ils seront toujours en eux mais ça ne veut pas dire que chaque album de ces groupes aura des allures d’hommage.

Crazy, déjà, était basé sur un sample de Gianfranco Reverberi (la B.O. de Django, prépare ton cercueil)… Vous devez en quelque sorte votre carrière aux musiques de films italiennes.

D.M.: Oui. C’est intéressant. Ce fut pour moi une grande source de motivation. Quand l’idée du premier Gnarls Barkley a germé, j’avais l’impression que tout le monde me voyait comme un monsieur sample, une espèce de DJ. Et je me suis dit je vais leur montrer. Je n’ai pas de formation classique. Je ne peux pas m’asseoir et écrire de la musique sur une feuille en papier. Je compose au piano ou à la guitare. Mais ce n’est pas la même chose que de rassembler des gens. A ce moment-là, tu fais ce que tu peux…

Bref. J’ai dû sampler quelques trucs comme pour Crazy mais je voulais avant tout me prouver que je pouvais enregistrer des choses différentes si on m’en donnait les moyens. Sortir ce que j’entendais dans ma tête mais ne pouvais écrire. Quand j’ai découvert The Italian Story de Daniele, je me suis dit: ça, ça m’inspire.

D.L.: Je me souviens encore de la première fois où j’ai entendu Crazy. Ça sonnait comme une vieille mélodie classique mais je n’arrivais pas à mettre le doigt dessus. C’est ce qu’il y avait de plus cool. Je savais d’où ce son venait.

Est-ce que vous avez rencontré Morricone?

D.M.: Non. Je ne veux pas rencontrer quelqu’un qui ne désire pas faire ma connaissance. Et il n’y a aucune raison qu’il en ait envie. Il s’en sort très bien avec ce qu’il fait. Je ne veux pas l’ennuyer.

D.L.: Tu ne veux pas le rencontrer en tant que fan?

D.M.: S’il habite un jour à côté de chez moi et a besoin d’£ufs ou de sucre, ce sera le moment idéal. C’est bien plus naturel que de débarquer et balancer: salut, j’adore ta musique. Probablement la pire des choses que tu puisses dire d’ailleurs. S’il veut m’emprunter quoi que ce soit, un DVD ou un truc du genre, il est le bienvenu. Je possède quelques raretés…

Est-ce facile d’être un auteur quand on bosse avec U2?

D.M.: Auteur n’est sans doute pas le mot qui convient. Mais quand je travaille avec U2 ou les Black Keys, j’exerce manifestement une influence sur eux. Il faut leur demander de quel ordre. Ou me reposer la question quand j’aurai 65 ans. Quand je serai grognon et vraiment honnête avec vous. D’ici là, je reste dans le politiquement correct.

GEERT ZAGERS

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